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Romain Goupil : la déchéance d’un soixante-huitard
administrateur
9 avr. 2018
3 min de lecture
Dernière mise à jour : 13 avr. 2018
Présentons Romain Goupil avant d’en venir à pleurer sur le cheminement de quelques-uns des soixante-huitards passés à la Macronie.
Le jeune homme a seize ans lorsqu’il tourne ses premiers films. Il est vrai que son origine sociale lui a été utile : son père était chef-opérateur. Parallèlement, lycéen à Condorcet, il sera à l’initiative de la création du CAL (Comité d’Action Lycéens) qui sera très présent en mai 68. Exclu du lycée à la suite du mouvement lycéen, il sera réintégré au lycée Voltaire. Tout en s'engageant dans une carrière de cinéaste (après avoir été assistant de Roman Polanski et de jean-Luc Godard), il milite à la Ligue Communiste où il est en charge du service d’ordre. Sa gestion quasi paramilitaire de ce service d'ordre conduira aux violents incidents du 21 juin 1973 opposant des manifestants aux forces de l’ordre qui protégeaient une réunion d’extrême-droite. Ces échauffourées conduiront, notamment, à la dissolution de la Ligue Communiste qui renait aussitôt en tant que Ligue Communiste Révolutionnaire (qui deviendra plus tard le NPA). Les dirigeants de la Ligue lui reprocheront cette aventure ce qui le conduira à s’éloigner de cette organisation trotskyste. Il fera partie de l’équipe qui poussera Coluche à se présenter à la présidentielle de 1981. Puis, peu à peu, il prendra un virage de plus en plus droitier qui le conduira d’abord à soutenir l’intervention en Irak en 2002/2003. Il deviendra ensuite membre du Cercle de l’Oratoire, groupe néo-conservateur dont la principale préoccupation est le soutien de la politique internationale des USA ! Enfin, à l’instar d‘un Cohn-Bendit, il soutiendra Macron à la présidentielle de 2017 et est depuis un ardent défenseur que les médias s’arrachent, comme Pascal Bruckner, pour disqualifier tout ce qui est à gauche de Macron.
Malheureusement pour lui, il va déraper lors de l’émission C’est politique sur la 5, le 8 avril où il lâchera son venin sur la France Insoumise et particulièrement sur Mélenchon. Notamment avec deux déclarations lamentables, stupides et mensongères. La première : « Mélenchon était à l’OCI [Organisation Communiste Internationaliste], et ils étaient contre Mai 68. Ce sont les premiers pavés que nous avons lancés, le 10 mai. Ils nous traitaient de petit-bourgeois merdeux déjà à l’époque, ils n’ont pas manifesté le 10 mai, et les premiers pavés qu’on a dépavés, c’est sur lui, c’est sur eux, c’est sur son groupe de l’OCI ». Le problème c’est que Mélenchon, qui avait 16 ans à l’époque, n’était ni à Paris, ni à l’OCI… Il étudiait en première à Lons-le-Saulnier où la situation est restée calme en 68. Citons un paragraphe du livre de Lilian Alemagna et Stéphane Alliès (Mélenchon, le Plébéien, Robert Laffont, 2012) : « En ces quelques semaines d'agitation, Jean-Luc Mélenchon se révèle dans l'action politique. Déjà leader, il se met très vite à fédérer les lycéens, prévoit des rencontres avec les professeurs, les syndicalistes, crée le Comité d'action lycéen (CAL) de Lons-le-Saunier. Une salle de la maison des jeunes et de la culture qu'il fréquente avec ses amis est à leur disposition avec une petite Ronéo à manivelle pour imprimer des tracts. Des manifestations sont organisées dans une ambiance plutôt bon enfant ; même le fils du préfet, Emile Mac Grates, gêné, fait parfois partie des cortèges lycéens emmenés par la bande de potes de Mélenchon ». Il semble donc difficile de dire que Mélenchon était, en 68, contre le mouvement. L’adhésion de Mélenchon à l’OCI, dont il ne s’est jamais caché, date de 72.
Goupil ne s’arrête pas là. Il va jusqu’à l’insulte en déclarant « Il est démagogue, nationaliste, de droite. Et il est tout-à-fait d'accord avec Marine Le Pen sur toute une série de thèmes. » Entendre ce réactionnaire dire de Mélenchon qu’il est de droite, c’est pour le moins amusant. En réalité, Goupil, comme son collègue Cohn-Bendit, se satisfait bien d’un système dans lequel il fait partie des privilégiés. Et ces deux-là accourent le plus vite possible quand il faut cirer les pompes de Macron et balancer des âneries sur ceux qui abîmeraient l’image de leur nouveau maître.
Goupil a réalisé un très beau film sur Michel Recanati, autre membre de la Ligue Communiste qui s’est suicidé le 23 mars 1978 : Mourir à trente ans. Il est dommage que Goupil ait renié les idées qu'il avait à cet âge...
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