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PETITS ÉLÉMENTS D’ÉCONOMIE (MAIS PAS LIBÉRALE…) – 3

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  • 27 oct. 2018
  • 10 min de lecture

Nous continuons notre dossier sur l’économie par l’examen de la plus-value, du taux de plus-value et du taux de profit.


La Plus-value

La plus-value, ou survaleur, est l'excédent que récupère un capitaliste après la vente de ses marchandises et paiement des salaires. Elle est créée dans la sphère de la production et elle est à la base du profit dans le capitalisme.


Expression schématique

La plus-value pl peut s'exprimer : pl = A' – A où A est le capital investi et A' > A le capital obtenu à la fin du cycle de production. Si l'on distingue les composantes (c = capital constant, v = capital variable), le capital s'exprime : A = c + v et A' = c + v'

Étant donné que c'est le capital variable v qui engendre un accroissement du capital, sa nouvelle valeur v' est supérieure et se décompose en v' = v + pl, pl représente ce qui est produit par les travailleurs, mais qui revient au capitaliste.


Taux de plus-value

Le taux de plus-value, ou taux d'exploitation, est le rapport pl / v. Il représente l'augmentation ou la diminution de la part non payée du travail cristallisé dans les marchandises, et il est important pour comprendre la dynamique du capitalisme (ses périodes de "prospérité" ou de crise...)


Exemple

Le possesseur d'argent achète la force de travail à sa valeur, déterminée, comme celle de toute autre marchandise, par le temps de travail socialement nécessaire à sa production (c'est-à-dire en l'occurrence par le coût de l'entretien de l'ouvrier et de sa famille). Ayant acheté la force de travail, le possesseur d'argent est en droit de la consommer, c'est-à-dire de l'obliger à travailler toute la journée, disons, 12 heures. Or, en 6 heures (temps de travail « nécessaire »), l'ouvrier crée un produit qui couvre les frais de son entretien, et, pendant les 6 autres heures (temps de travail « supplémentaire »), il crée un produit « supplémentaire », non rétribué par le capitaliste, et qui est la plus-value. Le taux de plus-value est dans ce cas de 100% (6/6).


Origine de la plus-value

La plus-value ne peut provenir de la circulation des marchandises, car celle-ci ne connaît que l'échange d'équivalents ; elle ne peut provenir non plus d'une majoration des prix, étant donné que les pertes et les profits réciproques des acheteurs et des vendeurs s'équilibreraient ; or, il s'agit d'un phénomène social, moyen, généralisé, et non point d'un phénomène individuel. La plus-value provient de la sphère de la production, dans laquelle est consommée la seule marchandise qui produise de la valeur : la force de travail.


Echange marchand simple

Si l'on considère une société hypothétique de producteurs indépendants produisant chacun leur type de marchandises et le vendant sur le marché, la situation est très proche de celle du troc. L'argent n'y sert que d'équivalent universel pour faciliter l'échange. La formule de la circulation des marchandises est : M-A-M (Marchandise contre Argent contre Marchandise). La masse monétaire totale reste constante.


À noter qu'il est possible dans ce cadre qu'un marchand se spécialise dans l'achat-revente avec profit, en jouant sur l'offre et la demande (j'achète moins cher là ou tel produit est abondant, je le revends cher là où on en manque...). Pour de tels marchands le schéma est certes A-M-A' (avec A' > A), mais ces profits équivalent à des transferts d'argent des producteurs vers les marchands, et non pas à une plus-value.


Echange dans le cadre capitaliste

A un certain degré du développement de la production des marchandises, l'argent se transforme en capital[1]. Les conditions historiques préalables sont :

· l'accumulation d'une certaine somme d'argent entre les mains de particuliers, à un stade de la production marchande déjà relativement élevé ;

· l'existence d'ouvriers « libres » à deux points de vue : libres de toute contrainte et de toute restriction quant à la vente de leur force de travail, et libres parce que sans terre et sans moyens de production en général, d'ouvriers sans maîtres, d'ouvriers-« prolétaires » qui ne peuvent subsister qu'en vendant leur force de travail.


La formule générale du capital est quant à elle basée sur A-M-A', mais il y a création de valeur. La valeur est créée au niveau de la production, si bien qu'il faudrait utiliser le schéma A-M-P-M'-A' : un capital A est investi dans la production, au cours de cette production une marchandise M est transformée en une marchandise M' qui contient la valeur de la marchandise M augmentée d'une plus-value, et cette plus-value est récupérée par le capitaliste sous forme de profit, lors de la vente.


Maximisation de la plus-value

La maximisation de la plus-value peut passer par trois biais : l'augmentation absolue, relative, ou différentielle.


Plus-value absolue

Le premier procédé consiste simplement pour le capitaliste à obtenir davantage de travail et par conséquent davantage de plus-value. Par exemple :

· Augmenter le temps de travail...

· Faire travailler les enfants...

· Diminuer les pauses des travailleurs...

· Ouvrir d'autres entreprises identiques ailleurs...

· Conquérir de nouveaux marchés...


Les exemples d'exploitation sauvage des travailleurs par le capitalisme ne manquent pas, que ce soit durant la première moitié du XIXème siècle en Europe ou un peu partout dans le Tiers-Monde, là où les luttes ouvrières ne sont pas parvenues à imposer des conditions décentes d'exploitation...


Plus-value relative

L'augmentation de la plus-value relative consiste à faire diminuer la valeur de la force de travail. Cela équivaut donc à diminuer le temps de travail nécessaire à sa reproduction, ce qui peut s'obtenir par l'augmentation de la productivité dans les biens de première nécessité (agriculture notamment) ou par l'importation de ces biens à moindre coût (cantonnement de pays dominés dans les matières brutes et spécialisation dans les produits à forte valeur ajoutée...).


Plus-value différentielle

Quant au troisième procédé il s'agit de profiter d'une augmentation de productivité pour produire plus de marchandises au même prix. La diminution du temps de travail nécessaire pour produire une unité de marchandise diminue leur valeur, mais le temps de travail socialement nécessaire, qui définit le prix de marché, n'a pas encore changé. Le capitaliste peut donc vendre ses marchandises au même prix qu'avant, empochant une plus-value supplémentaire.


Ces gains de productivité peuvent être obtenus soit par la machinisation, soit par une "optimisation" de l'organisation du travail (taylorisme, division du travail, management...). Cependant, une fois que la nouvelle technique se généralise, le temps de travail socialement nécessaire diminue et l'avantage différentiel est perdu.


« Le capitaliste qui emploie le mode de production perfectionné s'approprie par conséquent sous forme de surtravail une plus grande partie de la journée de l'ouvrier que ses concurrents. Il fait pour son compte particulier ce que le capital fait en grand et en général dans la production de la plus-value relative. Mais d'autre part, cette plus-value extra disparaît dès que le nouveau mode de production se généralise et qu'en même temps s'évanouit la différence entre la valeur individuelle et la valeur sociale des marchandises produites à meilleur marché. »[2]

Devenir de la plus-value

La plus-value est ce qui permet le profit et l'accumulation du capital.

Mais le capitalisme est un système social complexe et chaque capitaliste n'empoche pas exactement la valeur qu'il a lui-même créée à l'issue d'un cycle de production. La plus-value est distribuée entre :

· paiement des intérêts aux financiers

· paiement des dividendes aux actionnaires

· investissements dans la force productive

· salaires des dirigeants


En particulier, Marx a montré l'erreur de l'économie politique classique antérieure (depuis Adam Smith), d'après laquelle toute la plus-value transformée en capital va au capital variable.


Taux de plus-value

Le taux de plus-value, ou taux d'exploitation est une grandeur utilisée dans l'économie marxiste pour quantifier (de façon simplifiée) l'exploitation du travail par le patronat. Elle est quasi-exclusivement utilisée comme outil conceptuel pour comprendre le capitalisme.

Définition

Elle s'exprime comme le rapport de la plus-value tirée du travail exploité, et du capital variable (le salaire) [1]. Prenons l'exemple d'un ouvrier dont la valeur v de la force de travail est de 4 heures, qui travaille 8 heures. Il incorpore ces 8 h de travail dans les marchandises qu'il produit, tout en n'en coûtant que 4 à son patron. Son taux d'exploitation est donc : (8-4)/8 = 1/2 = 50%


Evolution

Depuis le début des années 1980, la tendance est à la hausse du taux d'exploitation dans la majorité des pays (aussi bien impérialistes que dominés). Les États-Unis et le Royaume-Uni font apparemment exception à cette tendance ; mais en réalité, la tendance est comparable à celle de l'Union Européenne si on défalque les très hauts salaires [2].


[1] Cf. Karl Marx, Le Capital, Livre I, ch. 9 : "Le taux de la plus-value".

[2] Aux États-Unis, selon Ian Dew-Becker et Robert Gordon, les salaires des 1% de salariés les mieux payés représentent 8% du PIB en 2013.

Source du graphique : BEA & BLS(Bureau of Economic Analysis/Bureau of Labor Statistics-USA)



Taux de profit

Le taux de profit est le rapport de la plus-value sur le capital investi. C'est un outil fondamental du marxisme, notamment via la loi de la baisse tendancielle du taux de profit qui explique l'instabilité et les crises du capitalisme.


Définition

Pour un capitaliste qui a investi un capital A = c+v et réalisé une plus-value pl, le taux de profit sera : TP = pl/A. La définition du taux de profit est donc :

Ou sous une autre forme obtenue en divisant numérateur et dénominateur par v :

où e = pl/v est le taux d'exploitation et co = c/v est la composition organique du capital.


Intérêt de cette grandeur

C’est un aiguillon de l'investissement. En effet, ce qui motive les capitalistes, c'est bien leur profit. Mais même s'il y a un volume de profit non nul dans un secteur ou une entreprise (A'-A > 0), les investisseurs gardent les yeux rivés sur le taux de profit pour décider de le pérenniser ou de plier boutique :

· un investissement est souvent lourd et risqué et il est nécessaire pour les capitalistes qu'il y ait un intérêt suffisant à le consentir,

· un investissement réclame une avance de capital, donc des emprunts aux banques ou l'accord des actionnaires, qui ne seront pas acceptés si jugés insuffisamment rentables ou trop risqués.

C'est donc pourquoi Marx considérait le taux de profit comme l'aiguillon du capitalisme.


Investissement et centralisation du capital

Les nouveaux marchés sont souvent explorés par de petits capitaux, qui prennent ainsi les risques les plus importants. C'est surtout pour ces petits capitaux qu'un taux de profit élevé est important, pour obtenir des financements, et accumuler suffisamment pour rembourser les dettes. Les entreprises qui connaissent un réel succès deviennent ensuite des grands capitaux (centralisation du capital), soit par une croissance externe fulgurante (Microsoft), soit par rachat par des grands groupes. Marx notait dans Le Capital : « Le taux du profit, c’est-à-dire l’accroissement proportionnel du capital, dit Marx, est important avant tout pour tous les nouveaux placeurs de capitaux se groupant indépendamment. Et dès que la formation de capital tomberait exclusivement aux mains d’une poignée de gros capitaux tout formés, le feu vivifiant de la production s’éteindrait - entrerait en somnolence. »[i]


Stabilité et instabilité du capitalisme

Le taux de profit et son évolution permet également de comprendre la dynamique de crise ou de croissance générale du capitalisme. Lorsque le taux de profit est élevé, les crises cycliques affectent peu l'économie, lorsqu'il stagne à un niveau relativement bas, les crises sont violentes et plus longues. La loi de la baisse tendancielle du taux de profit permet de comprendre pourquoi le capitalisme ne peut pas se stabiliser dans un état de croissance durable, et est voué à une instabilité chronique : « La baisse du taux du profit ralentit la formation de capitaux nouveaux et favorise la surproduction, la spéculation, les crises, la surabondance de capital et la surpopulation (entendre chômage) »[ii]


Taux de profit moyen

La capacité à créer du surproduit social est homogène sur l’ensemble d’une société. L’appropriation privée de ce surproduit est globalisée et ne se fait pas entreprise par entreprise, sinon il n’y aurait aucun intérêt à investir hors des sociétés de main d’œuvre puisqu’il n’y a que la main d’œuvre qui crée de la plus-value. En France, on considérait comme très satisfaisant un résultat de 7 ou 8% jusqu’au début des années 2000. On en est aujourd’hui à un nombre à deux chiffres…


Difficultés de mesures

Le taux de profit est un outil critique et les capitalistes utilisent généralement d'autre grandeurs, plus neutres ou qui leur sont plus directement utiles, comme le taux de marge, le taux de rentabilité, le ROE[iii]... C'est l'obstacle principal à l'établissement de chiffrages du taux de profit, qui oblige les marxistes à utiliser les données issues des comptabilités ou des statistiques capitalistes.

Les comptabilités nationales se basent la plupart du temps sur les déclarations au fisc des chefs d'entreprises. On imagine facilement qu'ils peuvent avoir intérêt à mentir sur les chiffres donnés.

« Pour les entreprises multinationales une méthode qui est apparue au grand jour récemment consiste à concentrer la déclaration d’activités en profit dans des pays à faible fiscalité, et inversement à prétendre que les activités qui s’opèrent dans des pays à forte fiscalité sont en déficit. C’est ainsi que Total prétend que ses activités françaises (essentiellement les raffineries) sont en perte pour ne pas payer un centime d’euro en France, alors que ses bénéfices globaux sont de 8 milliards d’euros ! Dans le même ordre d’idées, il est évidemment fallacieux de prétendre que les salaires des dirigeants des grandes entreprises constituent uniquement le coût de leur force de travail, alors qu’ils en décident eux-mêmes le montant, et gagnent en moyenne 190 fois le smic. Pourtant c’est bien dans la partie « salaires » et non « bénéfices » que vont ces sommes dans la comptabilité des entreprises. »[iv]


Distorsion par l'inflation

Une importante distorsion peut être causée par l'inflation. En effet, la rentabilité peut être grossie par l’augmentation apparente de la valeur des marchandises produites.


Distorsion par les gains de productivité

Lorsque les entreprises calculent leur taux de profit, elles divisent leur profit sur un certain nombre d’années par l’investissement qu’elles ont réalisé au cours de ces années. Mais cette comptabilité est complexe et les données nationales, qui sont le plus souvent utilisées en macro-économie, rapportent le profit au coût actuel, et non pas au coût historique. Ainsi, si des gains de productivité ont depuis réduit la valeur des moyens de production, le taux de profit calculé surestimera le taux de profit réel.


Distorsion par les profits fictifs

Enfin un élément qui a pris beaucoup d'importance ces dernières années est l'augmentation rapide de "profits fictifs" dus au secteur financier. Certains auteurs comme Robert Brenner se restreignent donc aux entreprises non financières pour éviter ce problème, mais même ces sociétés ont bénéficié d'une appréciation croissante de leurs actifs, qu'il est difficile d'évaluer.


Le taux de profit depuis 60 ans

Globalement, les économistes marxistes retrouvent une évolution du taux de profit assez similaire pour l'immédiat Après-guerre :

· un niveau élevé (20%) durant la Seconde guerre mondiale

· une tendance à la baisse plus ou moins marquée selon les auteurs


En revanche, il y a des divergences sur son évolution à partir des années 1980. Pour la plupart il est reparti à la hausse, mais sans revenir au niveau de l'Après-guerre.

Les courbes varient selon les zones géographiques considérées, mais la tendance sur le long terme est la même.

Sur le graphe suivant, l'effet de correction des données est illustré, d'abord en retranchant l'effet de l'inflation, puis en retranchant l'effet des gains de productivité par la méthode MELT (Monetary Equivalent of Labour Time).

Taux de profit mondial

Un taux de profit est en général mesuré pour un pays donné à partir de ses statistiques nationales. Toutefois, la question se pose de savoir si l'on peut mesurer un "taux de profit mondial", et si c'est pertinent. Cela dépend fondamentalement de la liberté de circulation des capitaux. Si elle était totale, il y aurait un vrai marché mondial et un taux de profit mondial clairement défini. Mais c'est un cas purement théorique, car le capitalisme est incapable de dépasser les Etats-nations. Cela dit, la vague de mondialisation qui a eu lieu depuis les années 1980 est la plus profonde jamais réalisée, donc elle rend possible d'estimer un taux de profit mondial.


Michael Roberts a produit le graphe suivant, qui montre que le taux de profit mondial suit celui des pays du G7, mais qu'il est nettement au-dessus depuis les années 1990. Cela explique les délocalisations.

Un taux de profit mondial sur longue période (1869-2009) a été estimé par le chercheur Esteban Ezequiel Maito. Il fait apparaître une tendance séculaire à la baisse du taux de profit.


Les trois items ici exposés nous conduiront dans la partie 4 à examiner un élément central de l’économie : la baisse tendancielle

[i] Karl Marx, Le Capital, livre III, ch. 15

[ii] Le taux de profit aujourd'hui, Revue Que faire ?, Février-avril 2011

[iii] Return on Equity, RCP en français, Retour sur Capitaux Propres

[iv] Idem iii

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