top of page

TRANSPORTS

Dernière mise à jour : 29 mars 2018

Pour des transports écologiques et accessibles


Ce livret a été rédigé par un groupe de travail coordonné par Laurent Courtois, syndicaliste SNCF, Karine Monségu, syndicaliste Air France et Jacques Stambouli, économiste.


Notre constat : les transports à reculons


Déplacer à la fois les personnes et les biens est indispensable au fonctionnement de notre pays. Le système des transports représente en France 18 % du PIB et emploie 1,34 million de personnes. Organisé comme il l’est, il ne répond pas efficacement à nos besoins. Les dernières décennies ont vu :

· l’ouverture généralisée à la concurrence et à la dérégulation sociale provoquée par les politiques européennes

· la priorité donnée au transport routier sur tous les autres modes

· l’abandon progressif du fret ferroviaire

· en matière de transport des voyageurs, la SNCF a donné la priorité au « Tout TGV » aux dépens des autres lignes

· l’allongement des temps de transport pour les voyageurs et l’inaccessibilité pour les personnes à mobilité réduite

· la réduction constante des budgets nécessaires aux voies navigables intérieures

· la privatisation des aéroports et la dérégulation du transport aérien, aboutissant à l’explosion du trafic « low-cost », synonyme de casse sociale

· la privatisation des ports maritimes.


Cette orientation politique profite essentiellement aux compagnies pétrolières, au BTP, à l’industrie automobile et aux banques. Elle répond aux intérêts des industriels qui ont encouragé le culte de la voiture par la publicité. En pratique, les gouvernements ont soumis le secteur du transport à la seule logique de la rentabilité.


La pollution due transports est massive. En France, l’accroissement de l’effet de serre est causé, pour plus des deux tiers, par les émissions de gaz carbonique (CO2). Le transport qui fonctionne au pétrole est le premier émetteur de gaz à effet de serre (GES) : 29% du total des émissions. Ces émissions sont en hausse. Le transport routier émet à lui seul 92% des émissions de GES !


Le parc automobile en France s’élève aujourd’hui à 26 millions de véhicules particuliers et utilitaires. Les véhicules diesel représentent 68 % du parc total, et 95 % des véhicules utilitaires roulant sur les routes françaises. Le moteur diesel est pourtant reconnu unanimement comme nocif par les communautés scientifique et médicale, occasionnant des épisodes graves de pollution aux particules fines et aux oxydes d’azote dans les villes, comme en 2016 dans les régions parisienne et lyonnaise.


La casse des services de transport est le résultat de la politique de l’Union européenne, politique libérale qui s’attaque aux emplois et aux conditions de travail des personnels. Ce faisant les services aux usagers se dégradent. Tous les secteurs sont touchés.


La réforme ferroviaire de 2014 est une déclinaison des « paquets ferroviaires » européens successifs (un « paquet ferroviaire » est un ensemble de directives européennes sur le fret et le transport). La fusion de Réseau ferré français (RFF) et de la SNCF n’a pas purgé, comme elle l’a prétendu, la dette ferroviaire de 44 milliards d’euros résultant du financement du réseau des Lignes grande vitesse (LGV). Cette dette est un des moyens de pression de la direction de la SNCF pour faire fonctionner cet établissement public comme une entreprise commerciale privée, pour supprimer des lignes et pour diminuer les effectifs, tout en payant des intérêts colossaux aux banques privées.


Avec 15 000 emplois supprimés depuis 2010, Air France subit de plein fouet l’application des directives européennes et le dumping social qu’elles génèrent.


La réforme portuaire de 2008 a privatisé les ports français et engendré la perte de plusieurs milliers d’emplois. Les entreprises de construction de matériels ferroviaires et routiers, les chantiers navals, les autoroutes ont été progressivement livrés au privé et à la seule logique du court terme et des profits.


Les transports collectifs répondent mal aux besoins. Ils n’apparaissent pas comme une alternative crédible à la voiture particulière. Selon l’Insee, en 2010 l'espace urbain regroupait 77,5% de la population métropolitaine et couvrait 22% du territoire français. Au nom de l’austérité, le nouvel appel à projets pour les transports collectifs urbains que prévoyait le Grenelle de l’Environnement a été abandonné.


La sécurité routière s’est dégradée après une amélioration continue de 2002 à 2013 : 3 427 tués sur les routes en 2013, 130 de plus en 2014, puis 59 de plus en 2015, soit + 5,5% en deux ans. L’année 2016 confirme cette évolution. La violence routière participe à la dégradation des conditions de notre vie quotidienne (vitesse, infractions, incivilité, etc.).


Le transport par vélo attend toujours une stratégie nationale volontariste. Le vélo est non polluant, bon pour la santé, économique pour le cycliste comme pour la collectivité. Pourtant les cyclistes ne bénéficient pas de la sécurité et du confort nécessaires. Au-delà des déclarations de bonnes intentions, le vélo est peu soutenu, en témoigne l’adoption d’une version rabougrie de l’indemnité kilométrique vélo.


Le transport ferroviaire de fret a été délaissé. La baisse du prix des carburants, conjuguée au dumping social par le recours à une main d’œuvre sous-payée d’Europe de l’Est, a favorisé le transport routier de marchandises. Le fret ferroviaire s’est effondré, passant de 52 à 32 millions de tonnes entre 2000 et 2014, tandis qu’il progressait par exemple en Allemagne et en Grande-Bretagne.


Le transport fluvial de fret est en voie d’extinction. Le réseau historique (Freycinet) de voies d’eau devrait évoluer pour augmenter son gabarit. Or, les investissements sont insuffisants. Le projet de canal Seine-Nord-Europe est surtout une vitrine : dans un contexte d’abandon du reste du réseau, il servira plutôt une flotte néerlandaise dont l’arrivée massive écrasera la batellerie française qui, tout en assurant plus de 60 % du transport fluvial, est déjà dans une situation d’extrême fragilité (500 exploitations encore à flot contre 3 000 en 1973).


Le transport aérien a été dérégulé. Les compagnies « low-cost » financées par les collectivités locales (donc par nos impôts) entretiennent une concurrence déloyale. En outre, les politiques libérales qui encouragent le dumping social, fragilisent les salariés.


Notre projet : des transports écologiques et accessibles


La planification écologique et sociale suppose une réorganisation profonde du système existant, traitant sur un pied d’égalité les populations urbaines, péri-urbaines et rurales.


La priorité doit aller à la réduction des impacts négatifs des transports en matière de consommation d’énergie, de climat, de santé et de sécurité.

Nous donnerons plus de poids aux associations d’usagers des transports collectifs, aux cyclistes et aux syndicats des personnels du secteur, afin de tenir compte de leurs analyses pour l’élaboration des décisions.


Pour inverser la tendance au réchauffement climatique, il est urgent de sortir de la dépendance au pétrole et donc de s’engager dans la recherche de solutions pour l’après-pétrole. Cette transition doit se faire en concordance avec l’objectif de la sortie progressive du nucléaire. Il faut dépasser la loi de 2015 sur la transition énergétique qui fait la promotion du seul véhicule électrique. Travaillons au développement des économies d’énergie et des énergies renouvelables et propres dans tous les transports, tant individuels que collectifs.


Nos propositions : une nouvelle politique du transport


1- Investir dans les transports de l’après-pétrole

Nous proposons un plan pluriannuel d’investissements dans les transports de voyageurs qui ne dépendent pas du pétrole : marche, vélos, bus à énergie propre, tramways, TER, métro, trains Intercités, TGV. Nous développerons le transport ferroviaire et fluvial et le transport maritime côtier.


La contribution carbone sur le transport routier de marchandises et la taxe kilométrique aux frontières dépendant de la distance parcourue permettront de palier en partie les saccages écologiques du libre-échange.


2- Développer le transport ferroviaire

Nous porterons une nouvelle loi de réforme du système ferroviaire pour unifier le rail en un seul pôle public. En conséquence, nous proposons de :

· Désobéir aux paquets ferroviaires européens pour bloquer l’ouverture à la concurrence du trafic intérieur des voyageurs prévue en 2023

· Développer les transports ferroviaires afin d’assurer un maillage adapté aux différentes échelles des territoires. Cela suppose de mettre en œuvre un plan de transport desservant harmonieusement et efficacement l’ensemble des liaisons TER, Intercités, TGV. Nous assurerons les liaisons entre agglomérations par des TGV, des trains Intercités, des TER et des trams-trains efficaces

· Revenir sur la loi Macron et les liaisons par autocars privés et polluants

· Ré-humaniser les gares grâce à la mise en place d’un personnel formé conformément aux valeurs du service public

· Soutenir les formules combinant le vélo et le TER, essentielles dans le cadre des déplacements domicile-travail : dans les régions qui ont fait ce choix, les quantités de CO2 émis ont drastiquement baissé.


Nous relancerons le transport de fret par voie ferrée, en particulier grâce au développement du transport combiné rail-route et du ferroutage (camions mis sur les trains), afin de réduire la part du transport routier des marchandises. Nous lancerons ainsi un grand plan ferroutage avec comme objectif que tous les camions traversant notre pays entre la frontière belge et la frontière espagnole passent sur des trains.


Un seul train de fret de 35 wagons peut porter à lui seul le chargement de 55 camions de 32 tonnes. Le fret ferroviaire est utile à l’économie du pays et à l’aménagement du territoire : il contribue au fonctionnement de pans entiers de l’industrie nationale ; il irrigue tout le territoire métropolitain. Une voie de fret utilisée draine avec elle des emplois directs (chargement, déchargement, conduite, etc.) et indirects (fonctions supports et d’appui), notamment dans les territoires ruraux. Nous inscrirons dans la loi le wagon isolé (messagerie ferroviaire) comme un service d’intérêt général.


3- Repenser la mobilité individuelle

Il est nécessaire de diminuer le recours à la voiture particulière et pour cela, réduire les distances parcourues. Cela impose l’aménagement des villes en quartiers accessibles à pied et en vélo, et la réorganisation des territoires autour des transports collectifs. Pour cela, nous proposons les mesures suivantes :

· Mettre en place une politique nationale en faveur du vélo et du vélo à assistance électrique (VAE) cohérente du national au local et suivie sur le long terme. Une attention toute particulière sera portée à l’intermodalité entre vélo et transports collectifs

· Favoriser le co-voiturage, l’autopartage et le transport à la demande

· Nationaliser les autoroutes

· Garantir la responsabilité de l’État dans la gestion et l’entretien des routes nationales. L’enveloppe budgétaire ainsi économisée par les régions sera réattribuée à la création de stations d’alimentation en énergies propres pour les véhicules. Nous mettrons de cette manière en œuvre les conditions de mutation du parc automobile vers les énergies propres (électricité et gaz)

· Organiser un plan de sortie rapide du diesel en ville

· Supprimer progressivement les avantages fiscaux liés au diesel pour les flottes d’entreprises.


4- Des transports accessibles pour toutes et tous

Afin de garantir à toutes et à tous la liberté d’aller et venir qui suppose un droit à la mobilité, les transports collectifs urbains seront gratuits pour les moins de 18 ans et les personnes sans emploi.


Dans les espaces ruraux ou difficiles à desservir par le ferroviaire, nous organiserons des services publics d’autocars avec une fréquence suffisante et la possibilité de se rendre à l’arrêt à pied ou à vélo pour inciter à moins utiliser la voiture.


Les outils numériques seront utilisés pour assurer le bon fonctionnement du système écologique de déplacements : modes actifs (marche, vélo, roller, etc.), transports collectifs, voiture partagée, seront connectés grâce à des correspondances étudiées, une tarification intégrée et une information globalisée, sans pour autant conduire à une quelconque « uberisation » des services qui y seraient associés.


Nous réaliserons des itinéraires cyclables pour relier les communes entre elles, comme c’est déjà le cas dans certains pays d’Europe (Pays-Bas, Danemark, Suisse). Les liaisons cyclables aux gares proches des parcours seront systématiques. Nous appuierons la réalisation de voies vertes et de véloroutes, appréciées de nos concitoyens comme des touristes étrangers, pour leurs loisirs et leurs vacances.


Nous atteindrons l’accessibilité totale progressive des transports collectifs publics et des villes aux personnes à mobilité réduite (personnes en situation de handicap, poussettes, personnes âgées, etc.). Nous viserons l’objectif « zéro obstacle » pour les personnes à mobilité réduite. Les préfets pourront se substituer aux maires pour imposer les travaux et fermer les bâtiments privés ne respectant pas la loi et imposer un plan de mise en accessibilité des transports, en particulier dans les trains Intercités.


Nous sanctionnerons les comportements sexistes dans les transports. 60 % des usagers des transports collectifs sont des femmes, 87 % des femmes affirment avoir été victimes de harcèlement dans les transports. Nous mettrons en œuvre un ensemble de solutions pour supprimer le harcèlement sexiste dans les transports : éducation des usagers, formation des agents des transports, formation des personnels de sûreté, simplification du dépôt des plaintes, espaces d’accueil et d’écoute des femmes.


5- Organiser la multimodalité

Afin de bannir le transport routier diesel de nos villes, une rupture de la chaîne logistique s’impose. Nous organiserons, en différents lieux de l’agglomération (gare, nœud autoroutier, sortie d’autoroute, port) des centres de distribution urbaine, bases logistiques de tri, de stockage, éventuellement de vente, où s’opérera cette rupture de charge. À partir de ces centres, nous mettrons en place une logistique « du dernier kilomètre » par toutes sortes de modes non polluants (camions au gaz naturel, camionnettes électriques, tramways de fret, triporteurs à assistance électrique). Pour les produits frais, issus de l’agriculture et de l’élevage, une logistique particulière de proximité sera mise en place, favorisant les circuits courts de distribution, avec des véhicules non-polluants.

Le transport fluvial est le moins polluant à la tonne transportée, même s’il utilise le pétrole. Un convoi fluvial de 1500 tonnes remplace 47 camions de 32 tonnes. C’est une solution de transports dans certaines zones urbaines et entre des plateformes logistiques. Nous favoriserons des investissements et des innovations dans ce mode de transports, en rénovant les infrastructures fluviales existantes, et en augmentant leurs capacités. Le transport fluvial devra être systématiquement relié aux ports maritimes.


La logistique intercontinentale se fait essentiellement par du transport maritime utilisant le fuel. Très polluant pour les océans et leurs littoraux, ce type de transport doit être modernisé et hybridé (utilisation de l’énergie éolienne, solaire). Le recours massif au dumping social (équipages sous-payés et sous-qualifiés) augmente les risques d’accidents graves (marées noires, naufrages). Dans le cadre du protectionnisme solidaire, le transport maritime intégrera des normes écologiques et sociales.


6- Arrêter les grands projets inutiles

Nous arrêterons immédiatement le projet de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes (NDDL). L’aéroport Nantes-Atlantique peut être agrandi. Les 1600 hectares prévus pour NDDL sont utiles à la préservation des écosystèmes et de l’agriculture biologique et paysanne.


Le projet d’autoroute ferroviaire Lyon-Turin sera également arrêté. Nous n’avons pas besoin d’une deuxième ligne ferroviaire – de surcroît privatisée – entre la France et l’Italie. Son unique motivation mercantile, imposée par des firmes multinationales, est d’intensifier le transport de marchandises vers et depuis les pays de l’Est. La ligne ferroviaire actuelle entre la France et l’Italie permet de mettre immédiatement 2 000 camions par jour sur des trains. Et donc de diminuer rapidement la pollution dans les vallées alpines, sans attendre l’issue d’un chantier aussi gigantesque qu’incertain.


Un projet aussi considérable (30 milliards, soit 20 fois Notre-Dame-des-Landes) ne peut être lancé sans véritable débat public. L’argent public prévu pour ce chantier doit, au contraire, être mobilisé au service du développement ferroviaire. Au niveau national avec notamment la mise en service d’une autoroute ferroviaire Nord-Sud. Au niveau régional également avec le doublement des voies uniques entre Grenoble et Valence, entre Aix-les-Bains et Annecy, entre Saint-Étienne et Clermont-Ferrand ; la décongestion du nœud ferroviaire lyonnais (traversée et sortie sud) et l’amélioration de la desserte Grenoble-Lyon.

1 vue0 commentaire

コメント


コメント機能がオフになっています。
bottom of page