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Macron ou la com’ avant tout

Dernière mise à jour : 16 juin 2018

Macron présenté comme le sauveur de l'Union Européenne avec son projet de budget (que Merkel ne prend pas trop au sérieux, que le 1er ministre hollandais rejette carrément) ou les listes transnationales aux européennes (proposition rejetée par le Parlement européen), Macron faisant plier Trump (alors que celui-ci l'humilie aussitôt la visite terminée), Macron sauvant le G7 (juste avant le fiasco), une émission spéciale sur Brigitte Macron, Reine de France, présentée comme un roman français sur une chaîne nationale... Décidément, la com' autour de Son Altesse ne faiblit pas. Dernier avatar, la question de la lutte contre la pauvreté...


Macron est intervenu ce mercredi devant le congrès de la Mutualité française. Son discours a été présenté comme le fondement d’’une nouvelle politique sociale. Pour ça, une campagne préparée par sa directrice de communication, Sibeth Ndiaye, sur tweeter notamment où une vidéo le montre parlant d’« un pognon de dingue dans les minima sociaux et les gens ne s’en sortent pas ». Le commentaire de la dénommée Ndiaye est dithyrambique : « Le président ? Toujours exigeant. Pas encore satisfait du discours qu’il prononcera demain au congrès de la Mutualité, il nous précise donc le brief ! Au boulot ! ».


Voici donc Notre Génie prêt à s’attaquer à la pauvreté dans notre pays. Sa grandeur Illuminée nous fait donc part du résultat de Son Intelligence Extraordinaire : « Je vais faire un constat qui est de dire : on met trop de pognon, on déresponsabilise et on est dans le curatif. Toute notre politique sociale, c’est qu’on doit mieux prévenir, ça nous coûtera moins, ensemble et mieux responsabiliser tous les acteurs. Les gens pauvres restent pauvres, ceux qui tombent pauvres restent pauvres. On doit avoir un truc qui permet aux gens de s’en sortir. Par l’éducation… » Fallait y penser : les pauvres sont pauvres parce qu’ils ont trop d’aides sociales qui les maintiennent dans cet état, parce qu’ils ne sont pas responsables et se complaisent dans la misère et de plus, ils sont incultes !


En réalité ce discours est celui de l’ultra-libéraliste qu’il est : les pauvres le sont de leur fait. Ils n’ont pas su répondre aux opportunités que la société leur offrait. Donc, il n’y a pas lieu de les aider dans la mesure où eux-mêmes ne font pas les efforts nécessaires : prendre n’importe quel job à n’importe quel salaire, n’importe où. Ou mieux encore : pourquoi ne créent-ils pas leur start-up ?

Il ne lui est pas venu à l’idée à Son Infinie Grandeur que si la pauvreté existe à un tel niveau (on parle de 16% de la population qui vit en-dessous du seuil de pauvreté fixé à 50 ou 60% du revenu médian, selon le seuil retenu, soit 846 ou 1 015 €), c’est à cause de la politique de casse sociale que lui et ses prédécesseurs ont menée ? Que c’est à cause de la mondialisation imposée par les plus riches qui désindustrialisent notre pays pour aller vers des contrées où on pourra payer les salariés une misère ? Que c’est à cause de l’incapacité de son gouvernement comme des précédents à conduire des politiques vertueuses en matière de transition écologique qui auraient créée des millions d’emplois ?


Ne lui est-il pas venu à l’esprit, à Ce Guide Suprême, que l’état de pauvre n’est pas choisi mais subi ?


D’ailleurs, que représente les aides sociales pour cette catégorie de nos concitoyens ?

Tordons le cou aux imbécillités que l’on peut lire dans la presse de droite : non, les aides sociales ne représentent pas 746 milliards d’euros (1/3 du PIB). Ce montant est celui de l’ensemble des prestations sociales qui n’ont rien à voir avec les aides sociales. On y trouve la sécurité sociale (payée par les cotisations), les allocations chômages (payées par les cotisations) et les retraites (payés par les cotisations). En ce qui concerne les aides sociales au sens strict, le montant est 72,9 milliards d’euros, rien à voir avec les chiffres avancés par les idiots utiles du patronat.

12,66 millions de foyers touchent les aides sociales sous forme essentiellement de :

· Prestations d’accueil du jeune enfant (PAJE) pour 2,1 millions de foyers et 11,5 milliards d’euros

· Allocations familiales pour 4,9 millions de foyers et 12,22 milliards d’euros

· Allocations de rentrée scolaire pour 3 millions de foyers et 1,95 milliards d’euros

· APL pour 2,8 millions de foyers et 8,19 milliards d’euros

· RSA pour 1,8 millions de foyers et 10,9 milliards d’euros

· Primes d’activité pour 2,7 millions de foyers et 5,06 milliards d’euros

· Allocations adulte handicapés pour 1,1 million de foyers et 8,82 milliards d’euros

· 14,26 milliards d’euros d’aides autres (CMU, ACS…)


On estime d’autre part que 30% des aides qui pourraient être versées ne le sont pas pour non-recours à celles-ci. Qu’est-ce que le « non-recours » ? C’est le fait, pour une personne, de ne pas recevoir une prestation ou un service auquel elle aurait droit. Les raisons sont essentiellement de quatre types[i] :

· la non-connaissance : la personne ignore que l’offre existe ou ne comprend pas qu’elle lui est destinée

· la non-réception : la personne effectue une demande, qui n’aboutit pas en raison de difficultés administratives, ou par négligence

· la non-demande : le bénéficiaire potentiel connaît l’offre mais fait le choix de ne pas la demander, pour diverses raisons

· la non-proposition : les agents qui traitent les dossiers n’orientent pas les personnes vers des aides auxquelles elles pourraient prétendre, par ignorance le plus souvent.


Pour le RSA seul, le non-recours représenterait 3,6 milliards d’euros, soit plus du tiers de ce qui est alloué.


En fait, l’opprobre jeté sur les plus fragiles des français, en accusant les aides sociales de maintenir dans la pauvreté les plus pauvres visent simplement à revoir fondamentalement le système d’aides. Et pour le Macronisme, c’est en réduire drastiquement le montant. Derrière la responsabilisation, on va imposer des conditions telles que les ayant-droits vont rejoindre le tiers des bénéficiaires qui ne réclament pas les aides auxquelles ils ont droit. Pour aller de plus en plus vers un système à l’américaine du chacun pour soi et l’État pour personne…


Derrière le discours populaire (ce qui résonne faux dans la bouche de Macron) qui veut nous faire croire que Notre Altesse prend en considération la situation des plus pauvres pour les sortir de ce cycle infernal qu’est la pauvreté et que ses commanditaires ont créé. Derrière cette mise en scène par ses services de communication, c’est bien une nouvelle atteinte aux droits sociaux qui se profile. Au demeurant, bien que démenti par le premier ministre, le chiffre de 7 milliards d’euros d’économies sur les aides sociales a circulé abondamment dans le cadre du rapport CAP 22 (rapport sur l’action publique demandé par le gouvernement).


Revenons maintenant sur une promesse de campagne de Macron : le ZAC, le zéro reste à charge pour un certain nombre de soins (lunettes et prothèses dentaires). Là aussi, il parle de responsabilisation dans le domaine de la santé : « Il faut prévenir la pauvreté et responsabiliser les gens pour qu’ils sortent de la pauvreté. Et sur la santé, c’est pareil. Tout le système de soins que je veux repenser, c’est aller vers plus de prévention pour responsabiliser, y compris les acteurs de soins, ajoute le chef de l’État. (…) C’est dans ce contexte-là qu’on fait le reste à charge zéro. […] C’est une politique de responsabilité car tout le monde va au pot, […] je demanderai des efforts aux mecs qui font des lunettes, aux types qui font des verres… ». Que veut-il dire en parlant de responsabilisation dans le domaine de la santé ? Qu’on ne remboursera les soins qu’à ceux qui auront eu les moyens de faire de la prévention ? Qu’on va copier le système américain où la santé coûte plus chère aux malades ? Quant à son annonce de ZAC sur les lunettes et les prothèses dentaires (rappelons ici que le principal syndicat de dentistes n’est pas enthousiaste sur cette mesure et les efforts qu’on demande à ses adhérents), ce fameux reste à charge ne sera pas l’effet d’une baisse significative du coût initial ni d’un meilleur remboursement de la part Sécurité Sociale mais par la prise en charge imposée aux mutuelles. Ce qui signifie, les mutuelles l’ont déjà dit, par une augmentation des cotisations. Comme il dit : « j’assume cette mesure ». Il peut puisqu’elle ne coûtera qu’aux assurés…

Bref, comment faire une annonce qui ne coûte rien ! Ses conseillers ont dû lui souffler cette annonce sociale pour contrecarrer l’image de président des riches qui lui colle à la peau. Et dont il n’est pas prêt à se débarrasser tant c’est vrai…


Voir les livrets de la France Insoumise sur la Pauvreté et la Santé dans l’onglet Livrets

[i] L’Observatoire des non-recours aux droits et services (Odenore)

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