Livrets France Insoumise
- administrateur
- 26 févr. 2018
- 8 min de lecture
Dernière mise à jour : 29 mars 2018
Les livrets de la France insoumise complètent L’Avenir en commun, le programme de la France insoumise. L’Avenir en commun n’a de sens que si nous le construisons ensemble au cours d’un processus collectif de débats. La collection des « Livrets de la France insoumise » offre cet espace d’échanges pour enrichir le programme en continu.
Les livrets abordent une variété de sujets qui donneront à la France son nouveau visage et l’inscriront différemment dans le monde. On peut gouverner autrement le pays si l’on se tourne vers le peuple.
Chaque livret expose les enjeux du sujet et dessine les perspectives d’une révolution citoyenne dont notre pays a tant besoin. Chaque livret présente aussi les mesures nécessaires pour y arriver. Le tout sera à chaque fois le fruit d’un travail collectif et coordonné.
Le programme L’Avenir en commun est élaboré sous la direction de Charlotte Girard, juriste et Jacques Généreux, économiste. La collection des « Livrets de la France insoumise » est coordonnée par Laurent Levard, agroéconomiste et Danièle Obono, chercheuse en anthropologie sociale.
Changer de République pour faire place au peuple
Ce livret a été rédigé par un groupe de travail coordonné par Mathieu Dupas, doctorant en droit constitutionnel et Charlotte Girard, maîtresse de conférences en droit constitutionnel et coordinatrice du programme.
Notre constat : la démocratie piétinée !
La démocratie ne consiste pas seulement à glisser un bulletin dans l’urne une fois tous les cinq ans ; elle suppose une implication citoyenne permanente dans la vie publique. Or la Ve République organise justement l’exclusion du peuple de la décision politique.
Nous vivons dans une monarchie présidentielle. Dans ce régime de pouvoir personnel, le Président de la République cumule les fonctions de chef de l’État et celles de chef de facto du gouvernement et de la majorité parlementaire, en particulier depuis l’inversion du calendrier électoral décidée par Lionel Jospin en 2001.
Comme souvent avec le pouvoir personnel, la monarchie présidentielle de la Ve République confine à l’irresponsabilité permanente. Élu pour cinq ans, le Président de la République n’est responsable devant personne, n’a de comptes à rendre à personne pendant son mandat. Il peut très bien bafouer tous ses engagements de campagne, sachant qu’il n’encourt aucune sanction, hormis le fait de ne pas être réélu au scrutin suivant, sous réserve qu’il y soit candidat ! Pire, son irresponsabilité de président contamine ministres, parlementaires, oligarques, comme l’ont démontré les affaires Cahuzac, Thévenoud ou, plus récemment, Fillon…
Ce règne de l’irresponsabilité politique permanente prévaut aussi au sein des institutions de la vie locale. À la monarchie quinquennale qui trône à l’Élysée répond le féodalisme des potentats locaux, petits roitelets de province dont le sentiment d’impunité (parfois renforcé par des politiques clientélistes locales) n’a rien à envier à celui du pouvoir central.
Ce régime est celui de la dépossession du peuple de sa part de souveraineté politique. En République, il n’y a pas d’autre souverain que le peuple. Pourtant, dans les faits, c’est tout le contraire qui se produit. L’exemple le plus connu et le plus scandaleux est celui du référendum bafoué du 29 mai 2005, lorsque la France a rejeté le traité constitutionnel européen ; à peine trois ans plus tard, le traité de Lisbonne, copie conforme du traité rejeté, était ratifié en catimini.
Comme si cela ne suffisait pas, tout est fait pour exclure encore davantage le peuple de la représentation politique, en particulier parlementaire. Compte tenu du mode de scrutin aux élections législatives, des formations politiques qui obtiennent 5 %, 10 %, parfois 15 % des suffrages des électeur·trice·s peuvent se retrouversans aucun·e élu·e à l’Assemblée nationale ! Lors des dernières élections législatives, la République en Marche a obtenu plus de 53 % des sièges alors qu’ils représentent seulement 18% % des électeur·trice·s inscrit·e·s. De ce fait, 82% des électeur·trice·s inscrit·e·s sont mal représenté·e·s, voire pas représenté·e·s du tout à l’Assemblée nationale !
De surcroît, le régime se caractérise par son instabilité institutionnelle. La Constitution de la Ve République devait, selon ses promoteurs, apporter la stabilité institutionnelle. Or cette constitution « stable » a été révisée 24 fois depuis sa création, sans compter toutes les tentatives de révisions inabouties dont les plus récentes ont concerné l’état d’urgence et la déchéance de nationalité...
Conséquence de tout cela, le peuple est en situation d’insurrection civique. Lors de certaines élections, plus d’un·e Français·e sur deux ne se déplace pas (exemple, les élections européennes de 2014 : 56,5 % d’abstention ; premier tour des élections départementales de 2015 : 49,83 % d’abstention ; premier tour des élections régionales de 2015 : 50,09 % d’abstention). Et encore : les taux d’abstention ne prennent en compte que les électeur·trice·s régulièrement inscrit·e·s sur les listes électorales. Il faudrait y ajouter tous ceux qui ne sont pas ou mal inscrit·e·s. Beaucoup de citoyennes et de citoyens sont – légitimement – dégoûtés, et se demandent à quoi bon aller voter sachant que leur vote ne sera pas pris en compte ; la trahison du vote de 2005 est dans toutes les mémoires.
Un système institutionnel à bout de souffle, un peuple qui se retire du champ politique… la crise démocratique est là !
Notre projet : une Assemblée Constituante du Peuple et pour le Peuple !
Face aux dérives chaque jour plus dangereuses et inacceptables du régime politique actuel de la France, nous appelons le peuple à reconquérir sa souveraineté.
Pour sortir de la crise civique et démocratique, il faut avant tout appeler l’ensemble des citoyennes et des citoyens à s’impliquer personnellement dans la réécriture collective du pacte qui fonde notre peuple et notre république. Et pour faire cette refondation républicaine, il faut convoquer une assemblée constituante dont le seul mandat sera l’élaboration d’une nouvelle constitution.
1- Une ambition historique !
Une assemblée constituante est une assemblée dont les membres sont désignés pour rédiger et proposer l’adoption d’une nouvelle constitution. L’ambition de se donner une constitution par ce moyen s’inscrit dans une filiation historique.
Certains régimes politiques français sont nés de la soumission à une occupation étrangère, comme la Restauration en 1815 ou le régime de Vichy en 1940. D’autres ont découlé de coups d’État institutionnels avec intervention de l’armée, comme les Premier et Second Empires, mais aussi la Ve République, dans le contexte de la guerre d’Algérie.
La France insoumise, elle, entend promouvoir le modèle de la révolution citoyenne par lequel une assemblée constituante est convoquée pour que le peuple reprenne en main les leviers de pouvoir. De cette manière il actera lui-même ses droits et fera ainsi valoir sa volonté.
Cette méthode a des précédents dans l’histoire de France. Les Première (via la Convention), Deuxième et Quatrième Républiques sont issues des travaux d’une assemblée constituante. Et, d’une certaine manière, c’est aussi le cas pour la Troisième République (c’est l’Assemblée nationale qui a adopté les lois constitutionnelles de 1875).
De même, dans les révolutions citoyennes d’Amérique latine, la convocation d’une assemblée constituante a été pour le peuple un puissant moyen de réappropriation de la démocratie politique. On peut encore citer, plus récemment, l’Assemblée constituante islandaise de 2011 ou l’Assemblée constituante tunisienne élue la même année, à la suite du Printemps arabe. Dans tous les cas, la finalité était identique : appeler chaque citoyen·ne à s’engager personnellement dans l’élaboration du contrat qui unit le peuple et la nation.

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