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LE CHOIX DU SAVOIR

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    administrateur
  • 5 mars 2018
  • 10 min de lecture

Dernière mise à jour : 29 mars 2018

Des moyens pour chercher et étudier


Ce livret a été rédigé par un groupe de travail coordonné par Hendrik Davi, docteur en écologie, Raphaëlle Temios, agrégée de sciences et vie de la Terre et de l’Univers et actuellement maître de conférences, et Jean-Louis Bothurel, docteur en linguistique allemande.


Notre constat : le savoir en danger


Créer, critiquer et transmettre le savoir sont des tâches nécessaires au développement humain. Elles sont d’autant plus fondamentales aujourd’hui face à la crise sociale et environnementale. La production et la diffusion des connaissances scientifiques sont ainsi essentielles pour l’émancipation, ce qui impose de les confier au secteur public, au service de l’intérêt général.


Aujourd’hui, l’enseignement supérieur et la recherche (ESR) font face à une déstabilisation sans précédent. Depuis l’adoption de la « stratégie de Lisbonne » par l’Union Européenne (UE) en 2000, l’ESR est soumis à la logique entrepreneuriale, à la concurrence et aux injonctions à l’ « innovation ».

Le grand levier de cette politique destructrice est l’austérité. Les recrutements ont plongé et presque la moitié des salarié·e·s de l’ESR sont des précaires. Les moyens actuels permettent au mieux de financer 30 % du fonctionnement des laboratoires publics. Par manque de crédits pérennes et stables, la recherche s’oriente toujours plus vers des projets pluriannuels sur appels d’offres, avec des procédures lourdes et chronophages. Et quels temps et énergies perdus car le plus souvent les dossiers de réponse aux appels d’offres se font pour rien : à l’Agence nationale de la recherche (ANR), en dix ans, le taux de succès est passé de 26 % à 9 % !


C’est un énorme gâchis : pour 1 € distribué à la recherche, 50 centimes ont d’abord été dépensés en temps de travail bureaucratique. La mise en concurrence des laboratoires, c’est d’abord le choix des démarches kafkaïennes. Or, l’argent est là : le Crédit d’impôt recherche (CIR), une niche fiscale notoirement inefficace censée inciter l’investissement privé dans la recherche, nous coûte 5,5 milliards d’euros par an !


Selon ces mêmes politiques technocratiques, le service public des universités passe par leur « autonomie », ce maître mot des responsables politiques, allant du FN au PS. L’autonomie, c’est d’abord la territorialisation : depuis 2013, les établissements doivent se regrouper dans des consortiums locaux sans cohérence scientifique ni soutien des personnels. Leur but est de mettre l’ESR au service des intérêts économiques et politiques locaux. En plus du démantèlement national, c’est l’émergence d’une nouvelle caste convertie à une « nouvelle gestion publique » très autoritaire qui accroît dangereusement bureaucratie et souffrance au travail des personnels (enseignants et administratifs).


Le désengagement général de l’État, en termes de moyens et de supervision, vise aussi à soumettre l’ESR à une logique marchande. La flambée des frais d’inscription est déjà programmée pour pallier la faillite des universités autonomes. Ceci pousse à un endettement accru des étudiants et alimente ce qui s’apparente à une bulle financière de la dette étudiante (1 160 milliards de dollars selon la Réserve fédérale de New York ; cf. François Delapierre, La bombe de la dette étudiante, éditions Bruno Leprince, 2013). Le cas des revues scientifiques est tout aussi symbolique : pilotées par les savant·e·s et financées par l’argent des bibliothèques, elles sont devenues la propriété d’éditeurs privés dont les marges sont faramineuses.


Enfin, la destruction de l’université frappe durement les étudiant·e·s, facteur de l’échec massif observé en licence. Le sous-investissement se traduit par la pénurie de bourses et le manque de logements étudiants décents. Cette dégradation des conditions d’études à l’université contraste avec l’investissement soutenu dans les filières « d’élite » que sont les grandes écoles.


Notre projet : refonder l’enseignement supérieur et la recherche


La création et la critique des savoirs au service du bien commun impliquent trois conditions :

· une indépendance accrue des chercheur·euse·s, garantie par un statut national et par des financements pérennes

· un dialogue renouvelé entre le savoir et la société, avec des universités populaires, le développement de pratiques participatives et un lien fort entre l’enseignement supérieur et le secondaire

· la reconnaissance du caractère collectif de la recherche et de l’enseignement et la sortie de la compétition généralisée et de « l’évaluationnite aiguë ».

La transmission de ce savoir en construction aux étudiant·e·s désireux de se former nécessite :

· d’affirmer la solidarité entre enseignement et recherche

· d’augmenter les moyens par étudiant·e à l’université

· de garantir par la loi le droit à la reprise d’études et à la formation continue

· le développement des cursus courts et la reconnaissance complète des qualifications du supérieur dans les conventions collectives. Cela vaut en particulier pour le doctorat.


Pour répondre à ces enjeux, il faut sortir de l’austérité. Nous porterons l’effort de recherche et développement (R&D) à 3 % du PIB, avec 1,5 % du PIB pour le secteur public en 2022, c’est-à-dire un doublement du budget de l’ESR en cinq ans. Il faut aussi en finir avec les nouvelles féodalités de l’ESR ; nous reviendrons sur les regroupements imposés et créerons une structure nationale démocratique de cadrage de l’enseignement supérieur public sur tout le territoire.


LEXIQUE

ANR : Agence nationale de la recherche

CIR : Crédit d’impôt recherche

CNRS : Centre national de la recherche scientifique

CNU : Conseil national des universités

ComUE : Communauté d’universités et d’établissements

CPGE : Classes préparatoires aux grandes écoles

EPST : Établissement public scientifique ou technique (ex. : CNRS, INRA, IFREMER, Inserm…)

EPIC : Établissement public à caractère industriel et commercial (ex. : CEA, ONF, CIRAD…)

HCERES : Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur

IDEX : Initiative d’excellence

INRA : Institut national de la recherche agronomique

IRD : Institut de la recherche pour le développement

ITA : Ingénieurs, techniciens, administratifs

LABEX : Laboratoire d’excellence

LOPRI : Loi d’orientation et de programmation de la recherche et de l’innovation

LOLF : Loi organique relative aux lois de finances

LRU : Loi relative aux libertés et responsabilités des universités, dite Loi Pécresse

MAP : Modernisation de l’action publique

PEDR : Prime d’encadrement doctoral et de recherche (ex-PES : Prime d’excellence scientifique)

PIA : Programme d’investissements d’avenir (piloté par le Commissariat général à l’investissement ; finance notamment l’IDEX et les LABEX)

RIFSEEP : Régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel dans la fonction publique de l’État RGPP : Révision générale des politiques publiques


Nos propositions : mettre les connaissances en commun


1- Rendre l’université gratuite et donner des moyens à l’ESR

L’inefficace et très coûteux (5,5 Mds €) crédit d’impôt recherche (CIR) sera aboli. Fondé pour aider à la « compétitivité » et vanté pour favoriser « l’attractivité fiscale », il profite notamment aux grands groupes via des montages avec leurs filiales dans les paradis fiscaux. Le transfert entre la recherche publique et les entreprises privées passera structurellement par l’augmentation du nombre de docteur·e·s au sein des entreprises et des aides ciblées aux PME.


L’université sera gratuite dès la rentrée 2017, prise en charge par l’État. Nous visons un doublement du budget de l’ESR en cinq ans. Le plan d’investissement de début de mandat dégagera 2 Mds € pour rénover les universités et construire des logements étudiants. Il s’agira également d’aider les organismes (CNRS et EPST) à financer la construction de laboratoires, amphithéâtres et lieux de vie sociale, citoyenne et étudiante sur les campus.


Nous lancerons un plan de recrutement dans tous les corps de métiers et les catégories de la fonction publique. En attendant l’audit complet des besoins, un objectif de 5 000 chercheur·euse·s, enseignant·e·s-chercheur·euse·s et personnels techniques en trois ans est un minimum. Ce plan s’accompagnera de la titularisation des précaires correspondant à des besoins permanents, notamment pour créer des postes de maîtres de conférences. Le recours aux non-titulaires sera plafonné à 5 % des effectifs hors doctorant·e·s et stagiaires. L’application de la loi Sauvadet, connue pour ses effets pervers dans le monde de la recherche notamment, sera améliorée pour permettre de bonnes conditions de titularisation de l’ensemble des personnels.


Comme pour l’ensemble des fonctionnaires, la valeur du point d’indice sera augmentée de 7 % pour rattraper le gel entre 2010 et 2016. Les salaires des non-titulaires seront indexés sur ceux des fonctionnaires. Les primes au mérite et à l’excellence seront supprimées.


PERMETTRE À TOUTES ET TOUS D’ÉTUDIER

Les cursus de l’université seront gratuits. Le plan immobilier pour l’ESR inclura des espaces dévolus aux activités étudiantes. L’Avenir en commun prévoit aussi :

· un plan pour le logement où la construction de résidences universitaires occupera une grande place avec pour objectif 15 000 mises en chantier de logements sociaux étudiants par an (contre 6 600 par an entre 2012 et 2016)

· une allocation d’autonomie de 800 €/mois surtrois ans sous condition de ressources pour les jeunes engagé·e·s dans une formation qualifiante. Les bourses actuelles seront maintenues pour les cursus supérieurs à trois ans.


2- En finir avec la bureaucratie de la mise en concurrence

Les structures de mise en concurrence et d’évaluation seront supprimées. Elles n’engendrent qu’inefficacité et perte de temps pour les personnels de la recherche. Elles masquent une privatisation des financements. Ainsi, l’ANR et les structures liées aux Investissements d’Avenir seront supprimées. Les fonds équivalents seront affectés à la recherche, pour une dotation de fonctionnement de l’ordre de 12 500 € par an et par personnel titulaire, hors grands équipements.

Le Haut Conseil à l’évaluation (HCERES) sera supprimé. Les modalités de l’évaluation des unités seront discutées par concertation entre les différent·e·s acteur·trice·s.


3- Renforcer le CNRS et les organismes de recherche

Le CNRS et les instituts de recherche font la force de la recherche de notre pays. Ils ont permis des avancées majeures pour les connaissances mondiales. Loin des velléités de destruction de leurs statuts particuliers, nous renforcerons leur indépendance. Nous mettrons fin à la satellisation et au démantèlement des établissements publics scientifiques et techniques (EPST : CNRS, INRA, Inserm, Inria…). Ce retour à des EPST forts sera accompagné d’une collaboration accrue au sein d’équipes mixtes et de projets multi-unités.


Les chercheur·euse·s du public auront interdiction d’être rémunéré·e·s par le privé et seront couvert·e·s par le régime des lanceurs d’alerte.


4- Reconstruire le service public de l’enseignement supérieur

Après la dissolution des « Communautés d’universités et d’établissements » (ComUE), les universités seront rassemblées dans une seule structure nationale souple et démocratique.


La dualité entre grandes écoles et universités sera remise en cause. Les grandes écoles publiques, recentrées sur leurs missions d’intérêt général, seront associées à des universités en égalisant les moyens octroyés. Nous créerons un service public national de l’enseignement supérieur artistique, en cotutelle avec le ministère de la Culture.


Donner un cadre national à l’université

Nous garantirons l’indépendance statutaire des enseignant·e·s-chercheur·euse·s et assurerons un cadre national des diplômes.

L’université aura deux organes délibératifs : le Conseil national de l’ESR (CNESER) et le Conseil national des universités (CNU) seront rénovés et démocratisés. Les établissements relevant de ce cadre national ne pratiqueront pas de frais d’inscription, qui seront pris en charge par l’État. Ils seront laïcs et seront les seuls autorisés à remettre des diplômes reconnus pour les concours de la fonction publique et les conventions collectives.


Le service d’enseignement des enseignant·e·s-chercheur·euse·s sera abaissé à 160 heures de travaux dirigés (TD) et le service des enseignants sans décharge de recherche, de 386 à 300 heures de TD. Les heures complémentaires, les vacations et les CDD techniques seront plafonnés.

La procédure de qualification sera remplacée par un recrutement national par le CNU. Le périmètre des sections du CNU sera revu, avec par exemple la création d’une section « Économie et société » afin d’assurer le pluralisme dans l’enseignement et la recherche économique et sociale. Le recrutement passera par un concours avec une phase d’admissibilité sur dossier et des auditions nationales pour l’admission. La phase de mobilité sera uniformisée.


Les étudiant·e·s de l’enseignement professionnel (BTS et DUT) auront vocation à être intégrés dans une licence professionnelle afin de mieux articuler les cursus courts. Cela concernera aussi les étudiants de CPGE qui rejoindront l’université pour obtenir leur licence. À terme, BTS et CPGE ont vocation à passer sous la responsabilité du cadre national de l’Université. D’ici là, l’initiation à la recherche et les passerelles vers l’université y seront encouragées.


Une expérience de recherche validée par un doctorat sera requise pour tous les postes impliquant la supervision de recherches dans le public. Dans le privé, les aides publiques seront conditionnées à l’embauche de docteur·e·s dans les postes d’encadrement.


DIX MESURES D’URGENCE

· Gratuité des formations universitaires et création d’une allocation autonomie.

· Rénovation des universités et construction de logements étudiants.

· Abrogation du CIR et augmentation du budget de l’ESR.

· Recrutement de 5 000 postes dans la recherche et titularisation des personnels précaires.

· Abrogation des lois Pécresse, Fioraso et Sauvadet ; mise en place d’un cadre national de l’Université.

· Moratoire sur les regroupements en cours, les appels à projets et la troisième vague du programme « investissements d’avenir ».

· Suppression de l’ANR, du HCERES et des primes au mérite.

· Accès gratuit des universités aux articles de leurs chercheurs sans enrichir les revues et bases de données privées.

· Création de sections « Création artistique » et « Économie et société » au CNU.

· Remise en cause de la dualité entre grandes écoles et universités en les intégrant et en égalisant les moyens octroyés.


5- Renforcer la démocratie dans l’ESR

Les fusions d’établissements déjà réalisées ou amorcées seront soumises à un référendum des personnels au niveau des composantes fusionnées, après audit public lorsque la fusion a déjà eu lieu. Les ComUE seront dissoutes et les Initiatives d’excellence progressivement démantelées.


Dans les laboratoires, un décret rédigé en concertation avec les différent·e·s acteur·trice·s garantira la démocratie interne : le laboratoire sera piloté par un conseil d’unité élu, qui se réunira au moins trois fois par an en formation plénière.


Dans les universités, un mandat unique sera instauré pour les président·e·s, désigné·e·s par les seul·e·s membres élu·e·s du CA en leur sein, et révocables par elles et eux. L’élection pour les postes à responsabilité sera privilégiée. Toutes les élections ne connaîtront plus que deux collèges, un collège étudiant et un collège des personnels, toutes catégories confondues.


6- Favoriser la diffusion des connaissances

L’accès ouvert et gratuit aux publications universitaires et scientifiques sera généralisé. Les connaissances acquises par les organismes publics et les universités seront par défaut rendues accessibles à tou·te·s, y compris donc aux acteur·trice·s privé·e·s.


Chaque université aura par exemple la responsabilité de « Boutiques de Sciences », déjà largement expérimentées à l’étranger et qui offrent un accès peu coûteux aux connaissances scientifiques et technologiques de pointe. Chaque université aura pour mission de créer une « université populaire » ouverte, avec des cours libres assurés volontairement par des enseignant·e·s-chercheur·euse·s dans le cadre de leur service. Les projets associant les citoyen·ne·s seront encouragés dans un esprit de diffusion des savoirs et de réflexion citoyenne sur leur usage.


Nous créerons un Erasmus francophone ainsi qu’une alliance universitaire de la Méditerranée qui permettra des échanges d’étudiant·e·s, d’enseignant·e·s et de chercheur·euse·s des deux rives. La création d’universités internationales thématiques, comme la Mer et l’Espace, sera proposée à nos partenaires.


L’enseignement secondaire sera associé aux programmes de recherche, qui seront présentés dans les lycées généraux, technologiques et professionnels, y compris hors des villes universitaires. Les projets communs seront encouragés.


7- Formation des enseignant·e·s et pré-recrutement

La formation des enseignant·e·s du primaire et secondaire se fera par un système de pré-recrutement. Les masters d’enseignement seront accessibles sur concours dès la fin de la licence et ouvriront droit à un statut d’élève-fonctionnaire. Ces cursus permettront de solidifier les bases disciplinaires et épistémologiques tout en acquérant les méthodes d’enseignement au cours de stages. En fin de formation, les futur·e·s enseignant·e·s pourront prendre en charge des classes, ce qui permettra aux titulaires de suivre des formations continues en parallèle. Les enseignant·e·s-chercheur·euse·s seront formé·e·s à l’enseignement pendant leur thèse et bénéficieront aussi d’une formation continue. À leur prise de fonction, les enseignant·e·s stagiaires effectueront un service allégé.


Un pré-recrutement sera notamment mis en place en 2e cycle de médecine, pour alimenter un nouveau corps de médecins fonctionnaires (voir le livret « Santé » dans la même collection). D’autres champs prioritaires pourront bénéficier de mesures semblables. Si les bénéficiaires rompent leur engagement, ils devront rembourser l’argent perçu. Parallèlement, un dispositif de contrats jeunes permettra à l’État de rémunérer les étudiant·e·s de master s’engageant à présenter les concours de la fonction publique ou engagé·e·s dans une formation supérieure professionnelle en alternance.


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