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La journée du 24 novembre

Dernière mise à jour : 27 nov. 2018

Cette deuxième journée de mobilisation des gilets jaunes a été l'occasion de vérifier ce que signifie la violence d’État, le mépris de classe des élites pour ce mouvement populaire, les partis pris de la presse pour le pouvoir Macronien, de plus en plus autoritaire.


Mais aussi de constater que cette vague de mécontentement a du mal à trouver un débouché politique devant le sentiment d'abandon ressenti par la majorité des participants à ce mouvement. La journée en elle-même Alors que le ministère avait voulu cantonner la manifestation au Champ de Mars (1), le choix a été fait par les participants d'investir les Champs-Élysées parce que c'est un symbole et qu'il n'y a pas de raison de ne pas en faire profiter les quartiers les plus riches de la capitale... Et puis, on est pas très loin de l’Élysée, là où se trouve le Petit Macron(2)... De cela, qui n'était caché par personne, Castaner aurait du tenir compte pour assurer la sécurité des lieux. À l'opposé, ne sachant trop où déployer les forces de police, il a rapidement ordonné l'emploi de la force, dès 11 heures du matin. Avant même que les excités ne viennent perturber le rassemblement plutôt bon enfant, comme au demeurant presque partout en France. Inévitablement, tout a dégénéré. Il est incontestable que des éléments néo-fascistes ont profité de l'occasion pour laisser exploser la violence inhérente à leur idéologie. Quel est le rôle de Le Pen qu'a voulu lui attribuer Castaner dans cette journée catastrophique ? Le Pen avait effectivement interrogé le gouvernement sur l'interdiction de manifester sur les Champs-Élysées. Mais elle n'avait certainement pas les moyens d'être l'organisatrice de ce rassemblement sur un lieu non autorisé. De fait, elle a essayé de profiter de la vague pour se mettre en avant, se prétendant même être naturellement la porte-parole des gilets jaunes ! Malheureusement pour elle, bien que des débordements inadmissibles aient eu lieu sur lesquels nous reviendrons, les gilets jaunes n'ont aucunement besoin d'elle pour manifester leur colère. Mais elle joue le rôle de l'idiote inutile qui permet de jouer la peur pour discréditer le mouvement. Ce qu'a tenté de faire toute la journée l'autre idiot de service. Parlons donc de lui. Suffisant, il a sans cesse mis en avant les graves incidents qui ont émaillées ce samedi, on aurait fini par croire que nous étions envahi de hordes barbares prêtes à massacrer tout le monde. Pour accentuer ce sentiment, il minimisera toute la journée le nombre de participants, finissant par le chiffre incroyable de 106 301 participants au niveau national. Il faudra nous expliquer quelle est sa méthode de calcul pour arriver à une telle précision au niveau national, alors que les chiffres annoncés à Paris sont de 8 000, beaucoup moins précis. Si la situation n'était pas aussi dramatique, nous pourrions rire fort de telles âneries... Justement, à Paris, sur les 8 000 participants annoncés par le ministère, 3 000 seulement auraient envahi les Champs-Élysées : comment se fait-il alors que notre glorieux ministre de l'Intérieur ait été incapable de réduire cette poche de dangereux terroristes alors qu'il avait depuis plusieurs jours annoncé des renforts conséquents de policier pour faire face à toutes dérives ? Ou bien a-t-il laissé faire après les premières charges policières afin que les gilets jaunes n'apparaissent que comme des casseurs ? Les violences se sont poursuivies jusque vers 21 heures. Et ne concernaient plus que 300 à 400 personnes difficiles à identifier : ultra-droite, black blocs, manifestants à bout de patience ? Dans toute la France, les mêmes scènes de violence ont eu lieu. D'abord violence d’État par l'envoi de CRS et de gendarmes utilisant non seulement des gaz lacrymogènes mais aussi des grenades de désencerclement ! Puis exactions de groupuscules douteux, accompagnés de purs casseurs. C'est à se demander si tout cela n'était pas concerté... À Tours, on a assisté aux mêmes scènes de violence, peu habituelles dans notre Touraine plutôt paisible. Même les simples passants et les commerçants du centre Tours qui ont vu les charges de CRS n'ont pas compris pourquoi un tel déferlement de violence de leur part... D'autant plus qu'il n'y avait que très peu de gilets jaunes, mais essentiellement des familles qui se promenaient tranquillement(3). Des charges de police totalement injustifiées. Mais aussi aux différents péages bloqués, rapidement dégagés par les forces de l'ordre avec les mêmes arguments très frappants, sans jeu de mots. Finalement, la vraie violence, n'est-ce pas celle de laisser dans la souffrance la majorité des français, n'est-ce pas de voir des parties du territoire voué à l'extrême pauvreté (comme à La Réunion où le taux de chômage est de 40 % et où le pouvoir n'a comme réponse que la répression, envoyant même l'armée en renfort !). Le rôle des médiasSans surprise, elles ont été dans leur ensemble l'auxiliaire zélée du pouvoir. Tant BFM que LCI ou CNEWS et l'ensemble des radios n'auront diffusés que les images des casseurs sans trop s'attarder sur les revendications portées par les gilets jaunes. Ainsi, large diffusion des images d'émeutes plutôt que celles des manifestations en France qui ne présentaient pas une telle violence. Une mention particulière à BFM qui présente des journalistes devant une partie dépavée de l'avenue des Champs Elysées alors que ce dépavage est non le fait des Gilets Jaunes, mais de travaux en cours ! Les reportages radio donnaient même parfois l'idée que nous étions en pleine guerre civile tant tout était dramatisé. Comment ces médias, qui tout au long de la journée se sont plus à reprendre les chiffres de Castaner, n'ont-elles pas vus les milliers de manifestants dans les villes de province qui contredisaient manifestement les infos du ministère (à l'unité près pour rappel) sans que ça ne choque aucun des journalistes vedettes. La collusion supposée ne l'est plus ! Au demeurant, les journalistes de BFM et d'autres médias ont été pris à parti par les manifestants, parfois assez brutalement. Nous ne pouvons évidemment pas cautionner ces pratiques. Les journalistes de terrain n'ont généralement rien à voir avec les rédactions qui les emploient souvent dans des conditions précaires. Mais, de fait, ce n'est pas à eux que s'en sont pris les manifestants, mais bien à ces médias qu'ils vomissent dorénavant tant leur mépris de classe et leur soutien à Macron est évident. Malheureusement, l'incarnation de ces chaînes TV et radios, sur le terrain sont bien ces pigistes qui ne sont pour rien, souvent, aux choix éditoriaux de cette presse qui n'en a plus que le nom... Toute la journée de dimanche, les chaînes d'infos (d'intox ?) ont repris le thème de la violence pour effrayer le bon peuple, complétant leur propagande par le soi-disant insuccès de cette journée du 24 novembre. Comment ceux qui ont vécu cette journée peuvent prendre ce déversement de haine semblable bientôt à ce que les tombes des communards de 1871 ont pu subir des Dupanloup, Thiers, Daudet et consorts ? Que faudra-t-il attendre de leur bienveillance quand ils verront des micros BFM, CNEWS ou LCI ? Ce qui est inadmissibleLes médias se sont répandus sur certains biais que connaissent les Gilets Jaunes. En effet, des propos et des gestes homophobes, racistes et fascisants ont eu lieu. Dans ce type de manifestation, est-ce évitable que d'y voir se greffer des imbéciles, souvent issus des milieux d'extrême-droite. Nous devons non seulement les condamner, mais aussi nous opposer très fermement à ceux qui les soutiennent. Parce que le pouvoir ne laissera rien passer de ce point de vue pour faire croire, comme Castaner le veut, que les gilets jaunes ne sont qu'un ramassis de gros beaufs d'ultra-droite dirigés comme des marionnettes par Le Pen.


Voilà comment Macon et ses acolytes répondent au Peuple en colère

La question des impôts et taxesUn des arguments favoris du pouvoir, relayé par leurs laquais, est d'insister sur le côté poujadiste du mouvement, perçu comme un refus de l'impôt et des taxes. Ce qui pourrait aussi signifier que ce ne sont pas les plus défavorisés qui manifestent puisque s'ils payent des impôts, c'est qu'ils sont dans les 50 % des français qui peuvent le faire. Que la revendication essentielle est la suppression de la nouvelle taxe sur les carburants. Très réducteurs en fait, car les manifestants entendus parlaient bien de leur difficulté à vivre, voire à survivre, au quotidien. Il ne faut pas se tromper : ce ne sont ni les impôts, ni les taxes qui posent un problème. Ce sont les salaires qui restent désespérément bas, le chômage qui ne se réduit pas, les conditions de vie qui se dégradent par l'abandon massif des services publics. C'est aussi l'inégalité fiscale qui réduit à néant le consentement à l'impôt, ce sont les cadeaux aux plus riches alors que les autres sont pressurés pour compenser ces cadeaux. C'est l’exaspération du peuple devant un pouvoir de plus en plus autoritaire et qui se sert en premier, comme le fait Macron : 500 000 € pour changer la vaisselle de l'Élysée, 35 000 € pour une piscine qu'il n'utilisera pas, 500 000 € pour refaire la salle de réception du palais présidentiel. Bien sûr, tout ça, ça n'est pas grand chose, mais ça se sait et ça vient contribuer au ras-le-bol général. Parce que c'est vécu comme des provocations. Que joue le gouvernement ? Et les partis politiques ?À travers le durcissement, la calomnie, le pouvoir cherche avant tout le pourrissement du mouvement. Il est d'autant plus enclin à le faire qu'il reçoit parfois des renforts inattendus à un moment où ce qu'on appelle les corps intermédiaires ont été réduits à quasiment rien. Et ne sont plus considérés comme des interlocuteurs. C'est le cas du secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, qui vient offrir ses services à Macron pour mettre un « pacte social de la conversion écologique ». Qui ne sera qu'un bidule pour réduire le mécontentement en lui lançant quelques os à ronger. Il ne suffit plus à ce représentant syndical d'avoir systématiquement accepté toutes les réformes tuant le Code du Travail, le voilà maintenant en recours de Macron qui s'effondre. Malheureusement, lui comme les dirigeants actuels ne comprennent rien à se qui se passe. Ils finiront comme Louis XVI, à demander s'il s'agit d'une révolte quand il s'agit d'une révolution... Le PS, par la voix de Boris Vallaud, son copain de promotion à l'ENA, propose un moratoire au Président, venant lui aussi à son secours. Il est vrai que ce parti fait la moue devant un mouvement duquel il est complètement exclu et dont il a une responsabilité dans son émergence pour avoir pratiqué une politique de droite, notamment sous le quinquennat de Hollande. De plus, il devient maintenant ridicule avec un Moscovici qui, écarté de la tête de liste du PS aux européennes, propose directement ses services à Macron, une Ségolène Royal qui se répand sur toutes les antennes, pensant encore qu'elle a un avenir national... Le PC vient juste de soutenir les gilets jaunes lors de l'élection de son nouveau secrétaire général. Mais il est vrai que cela faisait débat en son sein : soutenir ou pas ? Il faut reconnaître que ce débat était le même au sein de la France Insoumise. Il est tout aussi vrai qu'il a fallu un peu de temps pour comprendre la nature de ce mouvement. Très flou au départ, on le voit maintenant évoluer vers des propos plus politique que poujadiste, de la suppression de la taxe sur les carburants au slogan « Macron, démission ». De plus, les événements de ce samedi vont sans aucun doute commencer à radicaliser les revendications contre un pouvoir qui ne veut même pas entendre parler de ce peuple qui crie sa désespérance. Il est à regretter la position de la CGT qui, via Martinez, continue à refuser de s'associer au mouvement, malgré la grogne qui commence à enfler sérieusement dans ce syndicat sur cette question. Beaucoup de militants cégétistes ont d'ailleurs participé aux différents rassemblements de la veille. Pour d'autres syndicats, le silence est troublant... À droite, LR joue la surenchère avec le Front National (ou RN). Ainsi, Wauquiez se répand comme le porte-parole du mécontentement des français ruraux alors que c'est bien son mouvement qui a depuis longtemps contribué au résultat que nous connaissons aujourd'hui. Au demeurant, ce type ne s'en prend-t-il pas régulièrement aux assistés, aux fonctionnaires ? Sans pour autant se défaire des privilèges que lui accorde son statut de premier de cordée : pendant 13 ans, ses cotisations retraite ont couru au titre de maître de requête à la cours des comptes pour... deux mois de travail ! Son détachement après son élection en tant que député n'a pas mis fin à ce prodigieux avantage. Il faudra attendre qu'il soit publiquement connu pour qu'enfin il démissionne de la fonction publique pour faire cesser ce scandale. Ce qui n'empêchait pas le personnage de réclamer un départ plus tardif que les 62 ans à la retraite pour l'ensemble des salariés. Quand au FN, il tente la récupération tout en restant discret. Il sait qu'il pourrait cueillir les fruits électoraux de la politique de Macron. Malheureusement, rien dans son programme ne répond à cette situation de paupérisation des salariés. Avons-nous seulement connu un jour un pouvoir d'extrême-droite qui a contribué au bien-être social ? De plus, entend-on les mesures que prendrait le FN pour lutter contre le réchauffement climatique et engager la transition écologique ? Non, rien, ce n'est pas leur sujet. Leur sujet, c'est de jouer sur la peur, le désespoir et la haine pour arriver au pouvoir et appliquer une politique encore plus anti-sociale que celle que nous connaissons aujourd'hui. La suite ?À priori, les gilets jaunes appelleraient à une nouvelle journée de mobilisation le 1er décembre(4). Bien compliqué que d'émettre un avis sur ce que donnera ce mouvement. Cependant, une chose est certaine : s'il ne trouve pas de relais politique, il ne mènera à rien. Et si le relais politique est le FN, il risque de mener à une situation à l'italienne, à terme. Il est donc important de relayer la colère des manifestants de ces deux derniers samedis vers des revendications claires et fédératrices. Des revendications qui s'opposent à la politique ultra-libérale de Macron et de l'Union Européenne. Des revendications qui ne se limitent pas à la simple suppression de la taxe sur les carburants mais qui intègrent à la fois les problématiques sociales, de justice fiscale, de transition écologique. Sans vouloir jouer les récupérateurs d'un mouvement né hors de toutes structures politiques ou syndicales, nous devons non seulement soutenir ce mouvement, mais aussi de créer avec d'autres organisations politiques qui partagent avec nous des valeurs communes, les conditions d'une transition politique qui nous conduiraient à non seulement la démission de Macron mais aussi à la convocation d'une assemblée constituante. Pour en finir avec une Ve République qui n'a pas d'autre fonction que de maintenir l'ordre social et économique, permettant au 1 % les plus riches de la population de préserver ses privilèges.

(1) Pour qui connaît, c'est en fait une souricière dont on ne peut pas s'échapper si les forces de l'ordre bloque la vingtaine d'accès. D'autre part, pour remplir cet espace, il faut plus d'un million de personnes : même à 100 000 manifestants, le champ semble désert, ce qui aurait permis de dire, à l'aide des médias, l'échec de la manifestation.

(2) Allusion au livre pamphlétaire de Victor Hugo, Napoléon le Petit à la suite du coup d’État de celui qui deviendra Napoléon III, le 2 décembre 1851.

(3) Voir l'article de La Rotative https://larotative.info/marche-des-femmes-gilets-jaunes-et-3033.html?fbclid=IwAR1yEBjXGCLPmn4FbWEhHAVbHTHhZhtegnLJ5PbSQbVQQ3oW7B-xGFwT6Fk

(4) Ce même jour, la CGT a lancé un appel à manifester.

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