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High Tech à l'Élysée, suite

Dernière mise à jour : 29 mai 2018



Comme annoncé, la montagne a accouché d’une souris. Les entreprise "high tech" (on voit mal ce qu'y font Uber ou Deliveroo, sociétés de services) ont effectué leurs annonces à la suite de leur visite chez Macron. Elles ont été saluées par l’Élysée comme étant une grande avancée pour notre pays. Regardons-y de plus près…


Uber va renforcer la couverture assurance de ses chauffeurs en partenariat avec AXA. En clair, les risques encourus lors de leur activité par les chauffeurs Uber seront dorénavant couverts par cette multinationale. C’est la moindre des choses. Imagine-t-on un chauffeur routier obligé de régler lui-même son assurance lorsqu’il y a lien de subordination avec un employeur ? Encore faudra-t-il que le chauffeur ait effectué 150 courses dans les 8 semaines précédant l’incident.


Deliveroo va investir 100 millions d’euros en France pour y développer son activité. Quand on sait les conditions de travail qu’impose à ses coursiers cette société britannique, nous ne sommes pas certains de nous en réjouir…


IBM va créer 1 800 emplois dans notre pays… Après en avoir supprimé plusieurs milliers depuis 2010 ! De plus, 400 de ces 1 800 emplois avaient déjà été annoncés en mars. IBM emploie 7 500 personnes en France. Quel sera le solde net des emplois après l’application de cette mesure d’embauche ? En d’autres termes, tous les départs seront-ils remplacés en dehors de ces 1 800 postes ? IBM ne le précise pas…


La fondation Google va débloquer 85 millions d’euros pour des projets à but non lucratif. Mais sur cinq ans et sur l’Europe, l’Afrique et le Moyen-Orient, soit… 6 millions d’euros pour chacune de des zones géographiques par an. Rien au regard de son chiffre d’affaires (94 milliards d’euros en 2017). Quel est le montant des impôts que Google paye en France ? Quasiment rien (6,7 millions d’euros en 2015) alors que la facture aurait dû être de 1,2 milliards d’euros entre 2005 et 2010 qui ont été exonéré par la justice européenne (et le droit fiscal irlandais…). Ce qui représenteraient quand même 180 millions d’euros par an. 6,7 millions contre 180 millions. Google peut bien faire l’obole de quelques millions…


Microsoft, dont le CA est de 77 milliards d’euros va recruter une centaine de spécialistes de l’Intelligence Artificielle (IA) en France. Microsoft a supprimé des milliers d’emplois : 18 000 en 2014, 7 800 en 2015, 4 700 en 2016, entre 3 000 et 5 000 en 2017. Cette entreprise peut bien créer une petite centaine d’emplois en France, ça ne changera rien ni au chômage, ni à la capacité de la France de devenir un acteur de premier plan en IA.


Intel va collaborer avec l’institut Curie dans la lutte contre le cancer. On pourrait penser que c’est une initiative louable si ce n’est que cette lutte a un coût et que ce coût est largement dominé par les équipements de diagnostic et de soins, et par la chimiothérapie. Qui gagne de ce point de vue ? Les industriels qui vendent ces équipements et ces médicaments et en tirent des bénéfices scandaleux sur le dos des malades.


Openclassroom, start-up française, va former 250 000 intérimaires pour Manpower et 1 million de personnes dans le monde. Tient, serait-ce une entreprise sociale qui travaille pour le bien commun, si cher à Macron ? Pas tout à fait. Les formations qualifiantes proposées par cette start-up (qui n’en est plus une), ciblées sur l’ingénierie informatique, ont un coût. Ainsi, pour une formation sur 9 mois pour devenir chef de projet multimédia, il vous faudra débourser 2 700 €. Et puis, relativisons : ce million de personnes, ça sera seulement à partir de 2025…


La plate-forme de paiement en ligne Stripe s’engage à soutenir le développement de 100 000 nouvelles entreprises en France sur 5 ans. Sans vraiment dire comment. Et ainsi s’assurer 20 000 clients supplémentaires par an… (1,4% du montant des transactions lui reviennent pour une carte européenne et 2,9% pour les autres cartes).


Booking-com va créer dans le monde des bourses pour l’égalité hommes/femmes et soutenir des start-ups dans le tourisme pour 5 millions d’euros en 2018. Booking-com, c’est 69,2 milliards d’euros de CA transférés (c’est-à-dire collectés auprès des clients et redistribués auprès de ses partenaires), 10,8 milliards d’euros de CA propres (c’est-à-dire en moyenne 15,5% prélevés sur les réservations, donc un coût supplémentaire pour les clients et pour les partenaires de Booking-com, et 1,99 milliards de bénéfices nets en 2017. Les 5 millions d’euros, c’est donc 0,25% des bénéfices 2018 : une misère !


Le groupe VISA dont le CA est de 15,32 milliards d’euros et le résultat net de 5,6 milliards d’euros s’engage pour la création d’un centre d’innovation à Paris sur le commerce électronique et l’IA sans donner plus d’éléments…


Le groupe allemand SAP qui édite des logiciels pour un CA de 22 milliards d’euros et un résultat net de 3,6 milliards d’euros va lancer un programme pour les autistes (?) et s’engage à ce que les femmes représentent 30% des positions de leadership en 2022 contre 22% à ce jour. Une progression lente de 2% par an. À ce rythme, l’égalité est lointaine surtout sans engagement au-delà de 2022.


Enfin, la société Accenture va investir 171 millions d’euros sur cinq ans dans le monde pour des formations destinées aux personnes éloignées de l’emploi avec un objectif de 150 000 personnes en France jusqu’en 2020. Accenture est une de 500 premières sociétés mondiales. Elle est issue du cabinet Arthur Anderssen, spécialisée dans l'audit, les services fiscaux et juridiques, la finance d'entreprise et le conseil, qui s’était illustré entre 2001 et 2002 sur l’affaire Enron. En acceptant de valider des comptes falsifiés, Anderssen s’était condamné à suivre Enron dans une des plus grandes faillites de sociétés américaines. Accenture, qui œuvre dans les domaines de la stratégie d'entreprise, du conseil, de la transformation numérique, des technologies et des opérations s’est investie massivement dans le numérique et les nouvelles technologies. 98 des 100 plus grandes entreprises sont clientes d’Accenture. Son CA était de 29,8 milliards d’euros en 2017. Son résultat net était de 3,9 milliards d’euros en 2016. Les 171 millions sur cinq ans investis représentent 34,2 millions par an, soit 0,88% du bénéfice 2016.


Que penser de l’annonce faite sur ces mesures ? D’abord, les sommes engagées, nous l’avons vu, sont marginales en regard des CA et des résultats de ces entreprises[i]. Pour elles, il s’agit de donner une image de généreuses donatrices (bien que cela rapporte beaucoup à certaines d’entre elles) ou de contrecarrer la déplorable publicité (pour les affaires) qu’elles ont pour cause d’impôts nuls ou dérisoires (et cela grâce à l’optimisation fiscale et aux paradis fiscaux). Ces annonces auraient été faites même si les PDG de ces boîtes n’avaient pas été conviés à l’Élysée. Mais ils devaient bien ce petit remerciement au président qui les a tant choyés sur les mesures prises depuis le début de son quinquennat. Cela valait bien ces effets d’annonces cosmétiques et une bien belle photo de connivence.

[i] Excepté pour UBER qui, malgré un CA impressionnant, n’a jamais gagné un dollar depuis sa création, cumulant des pertes de 572 millions d’euros en 2014, 1,88 milliards en 2015, 2,39 milliards en 2016 et… 3,84 milliards en 2017 pour un CA de 6,5 milliards d’euros ! Cette société est pourtant estimée à une valeur de… 42,6 milliards d’euros. C’est bien la preuve que, parfois sinon souvent, l’économie ne tourne pas rond !


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