Ce contre-budget a été initié par la France insoumise et ses députés : il a été préparé par la commission du programme de la France insoumise, les économistes et hauts fonctionnaires du mouvement, en lien avec le groupe parlementaire et ses députés. Le groupe LFI a déposé plus de 400 amendements lors du débat budgétaire (PLF et PLFSS), ce document regroupe également les plus symboliques.
Affronter les urgences écologiques et sociales
La FI est prête à gouverner. Par ce contre-budget, elle démontre qu’un autre modèle réaliste, crédible, chiffré, gouvernemental existe et qu’il est possible et applicable dès maintenant. Plus qu’un instrument de communication en période de discussion budgétaire qui se contente de résumer quelques mesures symboliques, ce document rassemble plusieurs contributions d’ampleur :
· La présentation détaillée du scénario macroéconomique de l’Avenir en commun, (partie I)
· Le décryptage argumenté des projets budgétaires du gouvernement (partie II)
· Le chiffrage complet de notre budget 2018-2022 à partir du chiffrage de l’Avenir en commun effectué en février 2017 (partie III)
· Le détail du plan d’investissement de 100 mds (point 3 de la partie III)
Trois encadrés thématiques complètent ces parties :
· Faut-il craindre une remontée des taux d’intérêt publics ?
· En finir avec l’impunité fiscale : au diable les paradis !
· Quel impact pour le solde extérieur de la France ?
À chaque étape des chiffrages, les hypothèses prudentes sont privilégiées. Nous nous plaçons dans un cadre peu favorable, en prenant par exemple un multiplicateur budgétaire de 1,4 (voir partie I). Il est même choisi de ne pas tenir compte de toute la cohérence du programme en excluant les retombées positives attendues du protectionnisme solidaire, du processus européen ou du scénario de financement de la dette par la Banque centrale. Ainsi, il « joue avec les règles du jeu » de nos adversaires.
Que chacun se fasse un avis, deux modèles sont sur la table : la théorie du ruissellement et le libre-échange du gouvernement d’un côté, et de l’autre côté, la reconversion écologique de l’économie par la redistribution et l’investissement public.
Notre programme l’Avenir en commun est tourné vers l’avenir, il arrête le libéralisme mortifère et s’attaque aux défis du futur. Notre rupture est écologique face au fiasco macroniste irresponsable devant l’urgence climatique. Il répond aux urgences écologiques et sociales dans ses principales dépenses. L’austérité a échoué partout mais le gouvernement et ses alliés restent ancrés dans cette logique. La relance de l’activité par le partage des richesses et la planification écologique permettent de résoudre les problèmes concrets dont souffrent les Français. C’est un système qui est non seulement urgent mais qui fonctionne économiquement.
C’est un véritable cercle vertueux que propose l’Avenir en commun.
Toutes les organisations internationales, y compris le FMI, l’OCDE et même la Commission européenne appellent à une relance budgétaire par l’investissement pour sortir de la crise. Le vaste plan d’investissement public de 100 milliards permettra notamment d’assurer la transition écologique.
Ce programme est sérieux économiquement. Il faut un choc propulsif sur l’activité pour stopper la spirale déflationniste qui pousse tout le monde vers le bas et empêche le désendettement des États, des familles et des entreprises. Plus d’emplois, plus d’activité dans les secteurs d’avenir, c’est plus de recettes fiscales, plus de cotisations sociales et la pérennité de notre système social. C’est un cercle vertueux. L’austérité a tué la Grèce et est en train de tuer l’Espagne où elle a largement contribué à déliter le consentement national.
La dépense publique augmenterait de 5 points de PIB après cinq ans de mandat. Les nouvelles dépenses courantes sont estimées à 160 milliards pour un programme équilibré à long terme car toutes les nouvelles dépenses courantes sont financées. Le taux de prélèvements obligatoires augmenterait de 5 points de PIB.
Le total des nouvelles ressources dépasserait les +170 mds, avec pour principales recettes :
· Abrogation CICE et du Pacte de Responsabilité : +11 mds (20 mds alimenteront le fonds de solidarité interentreprises)
· Abrogation des niches fiscales antisociales et antiécologiques : +38 mds
· Nouvelles mesures en prélèvements obligatoires : +33 mds
· Lutte contre la fraude fiscale : +40 mds
· Effet d’entraînement de la relance de l’activité : plus de 55 mds
Ces chiffrages sont prudents car ce contre-budget ne tient pas compte de trois grands viviers de ressources :
· Aucune hypothèse n’est faite sur l’issue de l’audit citoyen de la dette : le service de la dette (42 mds en 2016) peut être bien inférieur à celui retenu.
· Concernant la lutte contre la fraude fiscale, une hypothèse conservatrice a été choisie de 40 mds de recettes annuelles supplémentaires à l’horizon 2022 (sous Hollande, 4 mds ont été récupérés). Selon les estimations existantes, la lutte contre la fraude fiscale peut rapporter entre 60 et 80 mds.
· La suppression des niches inutiles permettrait des économies bien plus im-portantes : en 2017, les dépenses fiscales (451 niches) ont pesé sur le budget de l’État à hauteur de 100 mds. Hors CICE, le chiffrage suppose des économies de 38 mds. Un audit exhaustif est nécessaire car il semble que les niches inutiles soient bien plus importantes. La Cour des comptes et l’IGF ont fait des rapports ravageurs sur l’efficacité des niches fiscales et sociales. L’IGF estimait en 2011 que les niches sans utilité économique et sociale réelle avaient coûté 52,5 mds (dont 39,7 mds de niches fiscales et 12,8 mds de niches sociales).
Le partage des richesses et la planification écologique ont un bilan positif sur l’emploi et devraient permettre :
· d’augmenter le niveau d’activité d’au moins deux points par rapport au scénario avec la politique budgétaire actuellement engagée à Bruxelles selon les hypothèses du projet de Loi de Programmation des Finances Publiques 2018-2022 ;
· de créer plus de deux millions d’emplois et de réduire le taux de chômage à 6 % en 2022 ;
· entre 2018 et 2022, le déficit moyen serait de 3,3 % de PIB, à comparer avec celui de Hollande (3,6 % du PIB entre 2013 et 2017) et celui de Sarkozy (5,4 % entre 2008 et 2012) ;
· de finir le quinquennat avec un déficit à 3 % de PIB, une dette au sens de Maastricht à 87,1 % (96,3 % actuellement) et avec un important surplus d’actifs publics.
I – Leur désastre macroéconomique, nos solutions de relance de l’activité
1. RÉPONDRE À L’URGENCE ET ÉRADIQUER LA PAUVRETÉ
Depuis le déclenchement de la crise financière mondiale et de la crise de la zone euro, plus d’un million de Français ont été rattrapés par la pauvreté et le chômage. En France métropolitaine, 2,6 millions sont au chômage au sens du BIT. Ceci représente 600 000 personnes de plus par rapport au début de la crise financière. Mais cette seule statistique ne résume pas l’ensemble des dégâts causés par la crise. Plus d’un million et demi de chômeurs sont exclus des statistiques du chômage au sens du BIT. Découragés par le manque de perspectives, ils ont renoncé à toute démarche de recherche d’emploi. La qualité de l’emploi s’est aussi dégradée avec la crise, le temps partiel subi devient de plus en plus important et touche aujourd’hui 1,6 million de salariés. Et même si ces statistiques sont impressionnantes, elles ne permettent pas de rendre compte de l’ensemble des souffrances provoquées par la crise : stress au travail, perte de logement, renoncement aux soins médicaux, une génération entière qui enchaîne stages et petits boulots…
Graphique 1 - Nombre de personnes au chômage, en sous-emploi ou inactives par découragement (en millions) – Source INSEE
La France et la zone euro ont perdu au moins une décennie pour résoudre les problèmes économiques qui l’affectent (chômage, précarité, endettement privé, risque déflationniste). Les politiques publiques mises en place, loin d’améliorer la situation, l’ont aggravée et ont retardé toujours plus les solutions à l’urgence écologique.
Cette crise qui n’en finit pas s’explique à la fois par les tendances longues du capitalisme, mais aussi par une gestion défaillante de la crise dans la zone euro :
· Fin d’un cycle du capitalisme financiarisé : la financiarisation de l’économie et le néolibéralisme ont permis de renverser la tendance à la baisse des profits dans un contexte de ralentissement des gains de productivité. Cette stratégie, qui limite le pouvoir d’achat des salariés, s’est construite sur une montagne de dettes pour solvabiliser la demande. Cette bulle financière a explosé au cours de la Grande Récession de 2008-2009.
· Une gestion de la crise aberrante dans la zone euro : pour répondre au choc global, la zone euro s’est distinguée par l’application d’une austérité massive, sans égal parmi les économies comparables, la mise en place tardive d’une politique monétaire non conventionnelle et l’accélération des « réformes structurelles ». Ces choix ont plongé la zone euro dans une « double récession » et dans la déflation.
Pour sortir de la crise, il faut sortir des vieilles recettes qui ont échoué.
2. LA FIN DE L’AUSTÉRITÉ PAR LA RELANCE DE L’INVESTISSEMENT ÉCOLOGIQUE ET LE PARTAGE DES RICHESSES
L’Avenir en commun propose de rompre avec l’austérité : un choc d’investissement de 100 milliards sur 5 ans sera mis en place. Ce plan devrait permettre notamment d’assurer la bifurcation écologique de notre système productif. Ce choc est conçu pour rattraper le sous-investissement cumulé. Les gouvernements précédents ont porté le taux d’investissement public à son plus bas niveau depuis que l’Insee publie les comptes nationaux (3,4 % du PIB). Ce choc d’investissement permettra enfin de sortir l’économie de la trappe déflationniste dans laquelle la France et la zone euro sont engluées, là où la politique monétaire a échoué.
Si ce choc d’investissement permettait de s’attaquer frontalement aux urgences identifiées par l’Avenir en commun, cela ne suffirait pas pour réparer l’ensemble des dégâts de la crise. Afin d’en finir avec la pauvreté, de garantir des conditions d’éducation de qualité, de donner des conditions de vie dignes pour les retraités et l’autonomie pour la jeunesse, un surplus de moyens publics sera nécessaire. Hors investissement et charge de la dette, la dépense publique augmentera en moyenne de 0,8 point de PIB par an. À l’horizon 2022, la dépense publique primaire représentera 58,4 % du PIB.
L’application du programme l’Avenir en commun génère de nouvelles recettes qui permettent d’équilibrer les nouvelles dépenses hors investissement prévues. Seul l’investissement public sera donc financé par la dette, ce qui constitue un gage de bonne gestion des comptes publics. Le taux de prélèvements obligatoires augmentera chaque année en moyenne de 1 point de PIB et atteindra les 49,4 % du PIB à l’horizon 2022.
Afin de quantifier l’impact macroéconomique du programme, il est nécessaire de faire une hypothèse sur l’effet multiplicateur lié à ce changement de politique budgétaire. Nos hypothèses sont très prudentes et en ligne avec les dernières recherches empiriques menées. Il existe un consensus parmi les économistes pour dire que le multiplicateur est positif1 et sensiblement supérieur à l’unité en mauvaise situation conjoncturelle. En 2014, le FMI2 a réalisé des études empiriques montrant qu’en moyenne, un choc d’investissement public augmente le PIB avec un effet multiplicateur 1,4 à un horizon de 5 ans dans les économies avancées. Selon le FMI, cet effet multiplicateur peut même atteindre une valeur de 3 à un horizon de 5 ans. L’hypothèse moyenne a été retenue dans nos projections.
L’efficacité de la relance par l’investissement public serait maximale si l’ensemble des pays de la zone euro menait la même politique. Cette politique de bon sens permettrait de répondre au sous-investissement chronique qui s’est cumulé partout en Europe, notamment en Allemagne où la qualité des infrastructures est jugée mauvaise. Il s’agirait d’une politique d’intérêt général qui permettrait à tous de sortir du piège de l’austérité en répondant aux grands défis auxquels nous faisons face. Faute d’ambition, le plan Juncker a échoué à créer le choc d’investissement si nécessaire pour répondre aux urgences sociale et écologique. Bien évidemment, si les autres pays refusent le changement de logique et restent cloués au dogme de l’austérité, la France devra montrer l’exemple. La réponse à ces défis requiert une action immédiate.
3. PLUS D’ACTIVITÉ ÉCOLOGIQUEMENT ET SOCIALEMENT UTILE, PLUS D’EMPLOIS
L’abandon de l’austérité permettra enfin de sortir de la crise économique. L’activité devrait croître en moyenne de 2,1 % par an entre 2017 et 2022 (tableau 1). Ces chiffres sont des prévisions à prendre avec précaution, comme toute projection macroéconomique. À titre de comparaison, les politiques austéritaires de Hollande et Sarkozy ont conduit à une croissance du PIB de +0,8 % entre 2013 et 2016 et +0,3 % entre 2008 et 2012. Par rapport au scénario actuellement engagé avec l’UE par le gouvernement pour 2018-2022, le surplus d’activité serait d’au moins 2 points.
Tableau 1 - Évolution annuelle du PIB en volume
L’emploi repart avec plus de 2 millions d’emplois créés grâce à l’application de l’Avenir en commun. Le scénario d’emploi et de chômage intègre les éléments suivant les dernières projections de population active de l’Insee, les effets de la réforme des retraites et le retour à la population active de chômeurs (selon l’Insee, 1,5 million de Français seraient des inactifs souhaitant un emploi). Par ailleurs, avec la bifurcation de notre système productif et la fin de l’austérité, environ deux millions d’emplois seraient créés dans le secteur marchand. L’Avenir en commun propose une stratégie ambitieuse d’emplois aidés sous la forme de « contrats jeunes » pour que tous les jeunes soient enfin intégrés à l’emploi. Enfin, après une décennie d’austérité, 200 000 fonctionnaires seront embauchés pour garantir la qualité des services publics à tous les Français et Françaises :
· Emplois publics : +420 000 (dont +200 000 fonctionnaires)
· Contrats coopératifs dans le cadre de l’État employeur en dernier ressort : 400 000
Dans ce cadre, plus de 2 millions d’emplois seraient créés. Le taux d’emploi augmenterait de 5 points. Ce serait la fin du chômage de masse et de la précarité généralisée. La bifurcation du système productif et l’investissement dans le potentiel de la société permettraient ceci. Le taux de chômage (au sens du BIT) devrait être proche de 6 % de la population active au bout de cinq ans. Actuellement, il se situe à 9,2 %. En plus d’absorber une grande part du chômage, cette évolution favorable de l’emploi devrait permettre de s’attaquer au halo du chômage tel que défini par l’Insee, conduisant à une hausse significative du taux d’emploi.
Au-delà de l’amélioration générale de l’activité, la croissance de l’emploi dans le secteur marchand s’explique par le ralentissement de la productivité. Ce ralentissement, négatif dans une logique libérale et productiviste, reflète essentiellement la bifurcation du système de production. En effet, la transition écologique aura comme conséquence le ralentissement des gains de productivité du travail et enrichira la croissance en emplois. Par exemple, l’agriculture biologique mobilise nettement plus de main-d’œuvre que le système conventionnel, mais par contre n’utilise pas d’intrants chimiques polluants. Il en est de même de l’élargissement du secteur non marchand.
Tableau 2 - Scénario d’emploi et de chômag
4. HAUSSE DES SALAIRES ET FIN DE LA TRAPPE DÉFLATIONNISTE
L’application du programme l’Avenir en commun devrait permettre de sortir du scénario déflationniste et d’augmenter les salaires. La fin de la spirale déflationniste devrait permettre d’alléger le poids des dettes privées et publiques. Les Français pourront enfin se tourner vers l’avenir et construire des nouveaux projets au lieu de craindre le banquier.
Après une décennie de stagnation, le salaire réel moyen devrait augmenter de 6 points entre 2017 et 2022. La hausse du smic (+15 % dès le début d’application du programme) et le fort recul du chômage expliquent cette croissance des salaires. Avec la croissance de l’emploi de plus de 8 points, la masse salariale sera très dynamique. Le pouvoir d’achat sera à nouveau au rendez-vous avec la croissance de l’emploi et des salaires.
En 2022, l’inflation des prix à la consommation devrait s’établir à 4,2 % en 2022 à la suite d’une accélération progressive des prix. L’application de l’Avenir en commun contribuera donc à la sortie de la trappe déflationniste, là où la politique monétaire seule a échoué. Si cette politique était menée de façon simultanée et coordonnée en Europe, la sortie de la déflation serait assurée, tout en réduisant les divergences internationales des prix. Alors que la déflation pour tous mène à la catastrophe, le choc d’investissement et la hausse des salaires répondent aux principaux défis auxquels nous faisons collectivement face. Ceci permettrait par ailleurs de mettre fin à la politique monétaire non conventionnelle, telle qu’actuellement mise en pratique, qui génère des risques d’émergence de bulles financières dont les effets pourraient être désastreux. L’Avenir en commun est le seul programme crédible et qui permet une sortie par le haut.
Tableau 3 - Scénario de prix et salaires
5. UN CERCLE VERTUEUX ABOUTISSANT À LA BAISSE DES DÉFICITS ET DE LA DETTE
Le redémarrage de l’activité et la sortie de la trappe déflationniste permettraient de rétablir les comptes publics. Entre 2017 et 2022, le déficit public devrait s’établir en moyenne à 3,3 points de PIB. Ce chiffre est à comparer avec un déficit moyen de 3,6 prévu par le ministère des Finances entre 2013 et 2017 (Hollande) et de 5,4 observé entre 2008 et 2012 (Sarkozy).
Cette trajectoire de déficits, dans un contexte où l’activité et les prix repartent, permet de diminuer le ratio de la dette sur le PIB. Ceci résulte notamment du choix d’une politique de relance dans un contexte où les multiplicateurs budgétaires sont élevés et de la sortie de la trappe déflationniste.
Même si c’est un critère absurde que nous ne reconnaissons pas comme règle ni comme objectif, nous faisons mieux avec les critères de nos adversaires : au sens de Maastricht, la dette publique devrait passer de 96 % de PIB en 2016 à 87 % en 2022. Cette baisse de 9 points contraste avec la remontée observée sous Sarkozy (+25 points entre 2007 et 2012) et sous Hollande (+6 points). La LPFP 2018-2022 présentée par le gouvernement d’Édouard Philippe table sur une dette à 91,4 % en 2022, soit 4,3 points de plus que notre scénario.
Tableau 4 - Scénario de finances publique
FAUT-IL CRAINDRE UNE REMONTÉE DES TAUX D’INTÉRÊT PUBLICS ?
La France – et l’Europe en général – auraient dû engager le choc d’investissement massif que nous appelions de nos vœux au moment où les taux d’intérêt étaient nuls, même à des horizons très longs. En janvier 2016, l’État français pouvait s’endetter à 10 ans à un taux d’intérêt de 0,1 % : tout investissement socialement utile aurait pu être rentabilisé. Les taux restent toujours à un niveau historiquement faible (0,7 % en octobre 2017). L’intérêt général impose d’agir sans retard.
Avec la remontée récente des taux, la gouvernance par la peur revient en Europe. Ceci permet de repousser toujours plus loin le choc d’investissement public si urgent. Or, ce vent de panique ne doit pas masquer que même si les taux d’intérêt remontent, ils restent à des niveaux extrêmement bas. Le refinancement de la dette qui arrive à maturité (contractée à des périodes où les taux étaient plus forts) par de la dette nouvelle à taux bas (même s’ils sont plus élevés que ceux qui prévalaient il y a un an) continuera à diminuer le taux d’intérêt moyen auquel la dette publique française est contractée. En moyenne, la dette de l’État français a une durée de vie de 7 ans et 195 jours. Si elle existe, la légère remontée des taux d’intérêt sera faible et se fera sentir avec un long délai sur le budget de l’État.
Comme pour l’ensemble de l’exercice de cadrage macroéconomique, nous avons adopté des hypothèses conservatrices et défavorables pour notre scénario. Nous avons ainsi supposé que les marchés financiers auront initialement une forte réaction de défiance vis-à-vis du programme l’Avenir en commun, et que le taux d’intérêt sur les nouvelles émissions de dette française augmentera initialement de 200 points de base. Puis, dans les années suivantes, la confiance des marchés reviendra compte-tenu des résultats obtenus, mais pour autant les taux nominaux ne devraient pas baisser significativement dans un contexte de normalisation de la politique monétaire en zone euro. Prudent, ce scénario ne tient pas compte du processus européen de transformation de la monnaie unique et de changement des statuts et des missions de la Banque centrale, qui favoriserait d’autant plus l’application de l’Avenir en commun.
Ceci ne doit pas faire oublier qu’en sortant rapidement du scénario déflationniste, notre programme permettra d’amortir le choc lié à la remontée des taux d’intérêt sur le coût réel du service de la dette.
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