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100% Energies renouvelables

Dernière mise à jour : 10 mars 2018


Ce livret a été rédigé par un groupe de travail coordonné par Jean-Marie Brom, physicien et directeur de recherche au CNRS et Anne Henry, ingénieure dans l’énergie et syndicaliste.



Notre constat : l’urgence climatique et énergétique


La crise écologique que nous traversons aujourd’hui est double :

· La crise climatique due à une consommation effrénée d’énergies émettrices de gaz à effet de serre pour satisfaire les besoins des pays les plus riches au détriment des autres s’accompagne d’une crise énergétique due à l’épuisement inéluctable des ressources non renouvelables que sont le charbon, le pétrole, le gaz, mais aussi l’uranium

· La consommation d’énergie croît de façon exponentielle : elle a plus que doublé depuis 1973 et son évolution suit celle des produits intérieurs bruts. Cette situation ne pourra pas durer : plus de 80 % de l’énergie consommée vient de sources non renouvelables (charbon : 20 % ; pétrole : 41 % ; gaz naturel : 20 % ; nucléaire : 2 %). Au rythme actuel, les réserves mondiales pour ces énergies seront quasiment épuisées d’ici un siècle. En outre, pour espérer ne serait-ce que contenir le changement climatique, l’essentiel de ces réserves devra rester dans le sous-sol


L’utilisation de ces énergies non renouvelables est également responsable de la pollution atmosphérique aux particules fines qui provoque chaque année des centaines de milliers de décès prématurés dans le monde. À cela s’ajoutent les dangers reconnus de l’énergie nucléaire : le risque d’accident majeur, devenu incontestable depuis les accidents de Three Miles Island, de Tchernobyl et de Fukushima, ainsi que l’accumulation de déchets nucléaires pour lesquels aucune solution n’existe à ce jour.


Enfin, la plupart des conflits de l’époque moderne (Afghanistan, Proche-Orient, Afrique sub-saharienne) ont à leur source des problèmes d’approvisionnement énergétique, à la base des intérêts géopolitiques d’un monde multipolaire. La raréfaction des ressources ne fera qu’accroître dramatiquement l’intensité de ces conflits si l’énergie continue à être produite à partir de ressources non renouvelables et dont les sources sont concentrées dans certaines régions du monde.


Ce diagnostic est partagé et certains engagements ont été pris par les États dans le cadre des négociations internationales sur le climat (protocole de Kyoto de 1997, COP 21…). Mais la mise en œuvre de mesures concrètes ne suit pas. Et surtout, ces engagements concernent principalement la limitation des émissions de CO2, alors que c’est l’ensemble de notre rapport à l’énergie qui doit changer si nous voulons surmonter la crise actuelle.


ÉLECTRIQUE ET NUCLÉAIRE, LES SOURCES DE L’IMMOBILISME DE LA FRANCE

La situation énergétique de la France se caractérise par un recours quasi absolu à l’électricité, énergie elle-même basée pour plus de 75 % sur la production nucléaire. Cette stratégie assimilable à du « tout électrique, tout nucléaire » est loin de garantir l’indépendance énergétique, puisque la totalité de l’uranium est importée et extraite dans des conditions contestables. Elle a également pour effet de freiner la transition vers les énergies renouvelables, et a entraîné un retard incontestable par rapport à nos voisins européens. Le secteur résidentiel et tertiaire, qui représente plus de 40 % de l’énergie consommée en France, reste dominé par l’électrique. Dans le secteur des transports (30 % de l’énergie), la part du diesel reste prépondérante malgré une baisse sensible. Les véhicules diesel représentent encore 52 % des ventes en 2016… contre près de 1 % seulement pour les véhicules électriques.


Dans notre pays, le manque de volonté politique pour s’engager vers la transition énergétique est manifeste : le débat organisé sur l’énergie à l’occasion de la loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) n’a pas permis une confrontation de scénarios, le service public ayant disparu au profit d’acteurs privés pratiquant un lobbying actif.


Les engagements des gouvernements précédents et actuels (Grenelle de l’Environnement, LTECV…) n’ont ni remis en cause les dogmes énergétiques passés ni donné de moyens pour leur réalisation. On peut ici penser à l’objectif de réduction de la part du nucléaire à 50 % d’ici 2025 et à la promesse, maintes fois réitérée, de la fermeture de la centrale de Fessenheim. Mais ils n’ont jamais été concrétisés, l’État laissant EDF maintenir sa capacité nucléaire, voire l’augmenter, et ce, à des coûts faramineux.


Par ailleurs, la loi LTECV n’acte pas – loin s’en faut – la sortie du diesel et le développement des véhicules électriques ou au biocarburant. Certes, elle fixe des objectifs relatifs aux travaux d’isolation nécessaires à la réduction de la consommation liée au chauffage. Mais là encore, elle ne donne pas de moyens de mise en œuvre et continue à viser un objectif de croissance en tant que tel. Même habillée de vert, cette croissance est incompatible avec la réduction annoncée, et nécessaire, de la consommation énergétique.


La politique énergétique des dernières années n’encourage ni la recherche ni les initiatives innovantes dans le domaine de l’énergie. Cette absence d’investissement se fait au détriment de la mise en place d’une filière française du photovoltaïque et de l’éolien, tout en accordant un soutien irresponsable et coûteux aux projets absurdes, comme la poursuite de la construction de l’EPR (réacteur nucléaire de troisième génération).


Notre projet : l’énergie, pilier de la planification écologique


Depuis plusieurs années, des stratégies de transition sont élaborées par des équipes de scientifiques notamment. Elles se basent à la fois sur une forte baisse de la consommation – sans perte de qualité d’usage – et sur un recours massif aux énergies renouvelables. Ces trajectoires de transition s’appuient sur des technologies existantes pour la plupart, ou en voie de l’être.


Des scénarios démontrent qu’une production de 100 % d’énergies renouvelables à l’horizon 2050 est possible. C’est le cas du scénario Négawatt pour l’ensemble du secteur énergétique et dans un système totalement indépendant, c’est-à-dire sans échange avec les autres pays. L’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie) propose également un mix 100 % renouvelable pour le secteur électrique à horizon 2050.

Ces solutions menant à une véritable transition énergétique peuvent ainsi être déployées rapidement, à l’échelle d’une génération, et à grande échelle, dès lors qu’elles sont portées par une détermination politique.


La France insoumise affirme non seulement sa volonté de réaliser la nécessaire et urgente transition énergétique mais entend surtout s’en donner pleinement les moyens :

• en faisant de l’énergie un bien commun et en remettant ce secteur essentiel au service de l’intérêt général

• en garantissant le débat démocratique sur les choix énergétiques, en particulier par la création d’un pôle public de l’énergie basé sur la renationalisation des compagnies énergétiques (électricité, gaz, pétrole) en lien avec des coopératives locales de production et de consommation d’énergies renouvelables

• en s’orientant vers un mix électrique 100 % renouvelable à l’horizon 2050, sur la base d’une planification donnant la priorité aux mesures de réduction de la consommation d’énergie – remettant en cause notre modèle productiviste – et au développement des filières d’énergie renouvelable

• en rendant effectif le droit à l’énergie par l’accès gratuit aux usages de première nécessité


Nos propositions : faire la transition énergétique


Pour viser l’efficacité, notre pays doit rattraper au plus vite son retard en matière de politique d’isolation des bâtiments, en commençant par les bâtiments publics et l’habitat social. En parallèle, les alternatives au chauffage électrique et aux combustibles fossiles doivent être généralisées.


LES MESURES D’URGENCE :

· Arrêter les subventions aux énergies fossiles

· Taxer le transport de marchandises par la route et l’aérien, par l’introduction d’une contribution carbone, et développer le ferroutage

· Rendre gratuits les transports collectifs urbains pour les moins de 18 ans et les personnes sans emploi.

· Mettre en œuvre la sortie totale du nucléaire en commençant par l’arrêt de la centrale de Fessenheim en garantissant l’emploi des salariés et leur formation pour en faire un site pilote du démantèlement et l’abandon de l’opération du grand carénage visant à prolonger la vie des centrales nucléaires au-delà de quarante ans

· Abandonner le projet d’EPR de Flamanville et d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure.

· Interdire l’exploitation du gaz de schiste et du pétrole de schiste et de houille.

· Mettre en place des schémas énergétiques au niveau national, régional et local

· Garantir l’accès à l’énergie domestique (chauffage, cuisson…) pour les plus précaires et mettre en place une tarification progressive incitant aux économies d’énergie

· Créer un pôle public de l’énergie pour mener une politique cohérente, en renationalisant EDF et Engie (ex-GDF) en lien avec des coopératives locales de production et de consommation d’énergies renouvelables et en favorisant l’autoproduction et le partage des excédents

· Soutenir les recherches et innovations sur les énergies les plus propres


1 - Créer un pôle public et réguler les prix


L’énergie est un bien commun. Son accaparement par des intérêts privés conduit à une dégradation du système, à un surcoût pour les usagers et à une perte de contrôle par la puissance publique de la politique énergétique. La planification écologique passe ainsi par la création d’un pôle public de l’énergie.

Nous reviendrons donc sur la libéralisation du secteur énergétique en abrogeant la loi NOME (Nouvelle Organisation du Marché de l’Électricité), tout en évitant les écueils des anciens monopoles publics. Il s’agira en particulier d’intégrer des formes de décentralisation et de garantir le contrôle citoyen aux différents niveaux de prise de décision.


Ce retour dans le secteur public permettra également d’offrir les mêmes garanties aux salarié·e·s de l’énergie, en étendant le statut des industries électriques et gazières à tou·te·s, afin que la transition énergétique ne se traduise pas par une précarisation de l’emploi.


Plus généralement, le prix de l’énergie ne peut être déterminé par le marché. Il doit bénéficier d’une garantie de stabilité dans le temps et répondre à des objectifs politiques complexes tels que la péréquation tarifaire, l’incitation aux économies d’énergie, l’accès à tou·te·s à l’énergie, le financement de filières moins polluantes, etc. Ce doit donc être un tarif défini par la représentation nationale.


2 - Garantir le droit à l’énergie


L’énergie fait partie des besoins fondamentaux. Les dispositifs actuels n’en permettent pas l’accès effectif à tou·te·s parce qu’ils sont trop limités et nécessitent des démarches stigmatisantes que nombre de citoyen·ne·s refusent.


Tout comme la santé, l’éducation ou l’eau potable, l’accès à l’énergie pour les besoins de première nécessité et indispensables à une vie digne doit être gratuit pour tous, sans condition de ressources. En outre, une tarification progressive doit permettre de pénaliser les mésusages et les gaspillages de l’énergie, dans un objectif global de réduction de la consommation.


3 - Réduire la consommation d’énergie par l’isolation thermique


L’énergie la moins polluante est celle que nous ne consommons pas. Les gisements d’économie d’énergie sont importants : relocalisation de l’économie pour éviter les coûts de transport de marchandises, développement du transport collectif, isolation des bâtiments, etc.


Il est possible, et le scénario Négawatt le montre, d’arriver à une baisse de 65 % de la consommation d’ici 2050 sans perte de service ou de qualité. Pour atteindre ces objectifs ambitieux, les travaux devront être pris en charge par l’État, rendant l’opération insensible en termes de coûts pour l’usager. Le plan d’investissement de 100 milliards du début de mandat vise ainsi l’isolation thermique de 700 000 logements pour 20 milliards d’euros. L’investissement public permettra de lever tous les freins à l’isolation et de planifier les travaux à mener.


Le secteur agro-industriel est l’un des responsables principaux de la production de gaz à effet de serre (agrochimie, transports de denrées, etc.). L’agroécologie offre un éventail de solutions qui contribueront à réduire ces consommations énergétiques et la nocivité des productions (voir le livret « Pour une agriculture écologique et paysanne » dans la même collection).


4 - Sortir des énergies fossiles et nucléaires


Dans le secteur électrique, la sortie des énergies fossiles et du nucléaire sera rendue possible par la baisse de la consommation, le développement des énergies renouvelables, le soutien aux infrastructures de réseaux et l’investissement dans les innovations énergétiques (« smart grids », stockage…). Ces différents leviers garantiront une transition énergétique effective, au plus proche des territoires et des citoyen·ne·s, tout en assurant la péréquation nationale et la création de nouvelles filières industrielles durables.

Dans les transports, le développement des transports collectifs électriques, des modes de déplacement « doux » (vélo et marche) sera associé au développement de carburants alternatifs (électricité, gaz de synthèse…) pouvant utilement remplacer leurs homologues fossiles.


Le « tout nucléaire » est une impasse : minerai importé, fragilité technologique, risques d’accident, problème des déchets… Cette source d’énergie doit donc être abandonnée. Pour autant, le parc nucléaire ne pourra fermer du jour au lendemain. Celui-ci doit être exploité dans des conditions optimales de sécurité jusqu’à la fermeture des centrales, ce qui implique notamment la limitation stricte du recours à la sous-traitance pour les activités ne pouvant être réinternalisées. L’ensemble des personnels de la filière seront assurés de conserver leur emploi, dans l’objectif d’assurer un haut niveau de compétence dans le démantèlement des centrales.


Enfin, pour permettre un débat public éclairé, seront rendues publiques les données sur l’enfouissement des déchets nucléaires depuis soixante ans afin d’informer sur les dangers sanitaires avérés ou éventuels.


5 - Intégrer l’énergie dans les choix d’aménagement

Nous veillerons à ce que les outils de planification énergétique à l’échelle nationale et territoriale, respectent l’obligation de prise en compte de l’énergie dans les schémas d’aménagement du territoire.


L’État devra montrer l’exemple, par exemple en intégrant une évaluation systématique de l’impact énergétique et en CO2 de la commande publique, et en lançant un grand chantier de rénovation des bâtiments publics.


Dans le cadre de l’application de la règle verte (se reporter au livret thématique dédié dans la même collection), le critère de minimisation de l’impact écologique ne devra pas être sacrifié au prétexte de rentabilité économique à court terme dans le choix des filières.


Les projets publics débattus démocratiquement feront l’objet d’un contrat de service public, déclinant des objectifs précis et des statistiques de suivi.


Un investissement dans la recherche publique sur ce secteur facilitera la sortie du nucléaire et des énergies fossiles. Cette attitude ouverte permettra de se libérer des intérêts privés de rentabilité à court terme, vis-à-vis des avancées technologiques.


La mise en place d’un groupe d’expert·e·s indépendant·e·s, permettant d’établir les avantages et inconvénients de chaque filière et la faisabilité des scénarios, aidera à la prise en main démocratique de la politique énergétique.



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